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DE LA PHILOSOPHIE CATHOLIQUE EN ITALE.

son indépendance. Pendant le règne de Marie-Thérèse et de Joseph II, on effaça les traces des dévastations espagnoles. La domination autrichienne se signala par des actes utiles, et bientôt elle se naturalisa en Italie. Loin de combattre l’industrie, elle la favorisa ; loin d’attaquer les idées nouvelles, elle supprima plusieurs couvens. Elle devançait le pays au grand scandale des dévots ; Beccaria était protégé par la cour de Vienne contre la noblesse de Milan. La révolution vint tout changer ; trois ans de république effacèrent tous les souvenirs. Mais quand l’Italie dut céder à Napoléon, il se reforma un parti autrichien en haine des idées nouvelles et de la domination française. En 1814, des dévots et des nobles allèrent à la rencontre des armées autrichiennes, et demandèrent le bon vieux temps de Joseph II ou plutôt de Marie-Thérèse. L’Autriche sut entretenir et déjouer toutes les espérances. Malgré les sollicitations de ses plus fidèles sujets, elle respecta tous les intérêts acquis par la révolution, laissa la noblesse sous l’empire du droit commun et le clergé tel qu’elle l’avait trouvé. Cela ne justifie pas, mais cela peut expliquer la force du gouvernement autrichien. Le Piémont, Modène, Rome, Naples, s’engagèrent dans de folles contre-révolutions : l’Autriche ne sévit que dans les limites voulues par la nécessité, elle songeait à se maintenir et profita de toutes les folies. Bientôt, cependant, les soulèvemens éclatèrent de Palerme à Turin ; la Lombardie se réveilla frémissante. Les princes italiens se trouvèrent alors à la merci de l’Autriche. Plusieurs gouvernemens, soutenus par les armées autrichiennes, se livrèrent à des réactions sanglantes. En Lombardie, où les troupes impériales n’eurent à livrer aucun combat, les conspirateurs furent cruellement persécutés, mais on épargna leur vie. Depuis 1814, l’administration autrichienne est toujours restée la même, impassible, impartiale. Si on excepte la Toscane, l’Autriche présente en Lombardie et à Venise le gouvernement le plus régulier, le plus empreint de l’esprit moderne qui soit en Italie. Les princes italiens sentent leur infériorité vis-à-vis de l’empire et se trouvent humiliés. L’Autriche connaît sa force, elle n’ignore pas qu’elle est indispensable aux princes, elle a ses projets dont elle poursuit l’exécution avec persévérance : en 1814, elle s’est fortifiée par l’acquisition de Venise ; en 1831, elle s’est ouvert la voie de Rome. En attendant, elle exerce une sorte de police dans tous les états de la péninsule ; elle les surveille, sollicite des répressions, empêche les concessions ; elle intervient par des conseils, au besoin par des ordres. De là une sorte de rivalité chez les princes italiens,