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dans le régime des douanes, ont ralenti l’essor des exportations françaises. Il résulte des déclarations du ministre que l’ensemble de notre commerce présente, relativement à 1841, une diminution de 5 pour 100, et que les valeurs exportées en produits du sol et des manufactures se sont réduites de 15 pour 100. Notre navigation a également perdu dans les relations de concurrence environ 7 pour 100, et 2 pour 100 dans les relations réservées, comprenant le commerce colonial et les grandes pêches maritimes.

Cependant, si l’on s’en rapportait à l’exposé des motifs dont M. Cunin-Gridaine a fait précéder la loi des douanes, cette décroissance, dont les causes principales se sont déjà modifiées, ne serait pas de nature à inspirer d’inquiétude. Elle ne tient en effet à aucun embarras intérieur qui nous soit propre ; elle constate la limite naturelle de nos moyens de production, qui ont suivi depuis vingt-cinq ans une marche constamment progressive, mais qu’il serait dangereux de surexciter au-delà des besoins véritables du marché intérieur et des débouchés ouverts au dehors. Si les progrès de la France s’arrêtent, s’ils n’ont pas égalé l’ascension rapide d’autres pays dans la carrière maritime et commerciale, M. le ministre fait observer que notre marche n’en est que plus sûre, et que la rareté de nos crises industrielles, en présence de celles qui affligent périodiquement quelques états rivaux, est un ample dédommagement des avantages d’une autre nature qu’ont pu leur assurer leur génie particulier et leur situation géographique.

Nous donnons un complet assentiment à ces sages principes, et nous les trouvons heureusement appliqués dans les plus importantes dispositions du projet sur lesquels les chambres sont appelées à statuer.

Celle qui regarde les machines et mécaniques nous paraît, comme à M. le ministre du commerce, d’une nécessité absolue. Protégée par un tarif élevé, la métallurgie française, malgré les progrès qu’elle a réalisés depuis quinze ans sous le double rapport du bon marché et de la qualité du produit, exerce sur la production de nos machines une influence limitative. En refusant de donner à nos ateliers en construction l’appui nécessaire pour les développer, nous nous condamnerions par cela même à n’occuper qu’un rang secondaire dans l’échelle des nations commerçantes. On sait que l’Angleterre avait prohibé long-temps la sortie de ses machines. Entrée depuis quelques années dans une voie différente, elle en encourage aujourd’hui l’exportation, et nous devons défendre notre propre marché contre une invasion qui atteindrait à sa source notre puissance productrice, puisqu’en cas de guerre la France se trouverait placée, par rapport à la fabrication des machines, dans un état fort dangereux d’infériorité. Le projet maintient le droit de 3 pour 100 sur les machines à vapeur, et élève le droit actuel sur les autres mécaniques de manière à consacrer la protection sur les différentes sortes d’appareils pour lesquels l’insuffisance du tarif actuel est manifeste.

De longues études ont précédé la résolution que le gouvernement a été appelé à prendre à propos de l’importation de la graine de sésame. Personne n’ignore que cette plante oléagineuse de l’Orient, importée à Marseille