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réduit à s’embarquer comme midshipman à bord d’un navire marchand, le futur officier des armées indiennes, prêt à mourir d’une maladie causée par le découragement et le chagrin, renaît en apercevant les minarets et les pagodes de Madras. Il débarque enfin sur le sol natal, maudissant la mer comme un naufragé, heureux de retrouver une famille qui l’attend et le console.

Nous n’accompagnerons pas le voyageur dans ses pittoresques excursions le long de la côte de Coromandel ; cette partie de son récit, abondante en descriptions variées, en piquantes anecdotes jetées çà et là avec une certaine précipitation, n’est guère qu’un prélude. On sent que l’écrivain reprend possession des lieux ; il raconte avec autant de joie que de surprise les réunions dans les riches villas, le contraste des deux sociétés européenne et hindoue, la familiarité des oiseaux qui assiégent les maisons dans les villes. Sa vie n’est pas assise encore ; attendons que, revenu d’un premier éblouissement, il cesse peu à peu d’esquisser des paysages et des scènes d’intérieur pour peindre ce pays mieux connu dans des tableaux sérieux et étudiés. En mettant de côté ces premiers chapitres, on peut diviser l’ouvrage en trois sections : 1o le précis historique de l’histoire du royaume de Golconde ; 2o le service militaire dans l’Inde ; 3o les considérations générales sur la puissance britannique.

I.

C’est à Hyderabad, capitale du nouvel empire de Golconde, que l’auteur va attendre une nomination de sous-lieutenant dans les armées anglaises. Dès en partant, il apprend d’un compagnon de voyage, capitaine du génie, le secret de voyager comfortablement dans ces contrées sauvages où l’on ne trouve des abris que de loin en loin. « Le capitaine traînait à sa suite une armée entière ; quatre chameaux et une dizaine de bœufs portaient quatre tentes, dont l’une carrée, large de vingt pieds sur tous les sens, servait de salon et de chambre à coucher ; une autre plus petite était envoyée chaque soir, une étape en avant, afin d’y trouver le déjeuner préparé après la course du matin ; une troisième et une quatrième servaient de chambre de bains et de cuisine. Plusieurs chariots marchaient aussi à la suite, portant des bagages sans nombre, tables, chaises, lits de camp, batterie de cuisine, vaisselle, argenterie, porcelaines, caisses de vin et de bière. Enfin, sous un groupe d’arbres, on voyait, attachés à des piquets, plusieurs chevaux de selle arabes que nous montions successivement pour faire environ