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L’ISTHME DE PANAMA.

mais il est de peu d’étendue. On assure qu’une vingtaine de navires le rempliraient. En 1840, quand M. Stephens le visita, c’était une profonde solitude. Il y avait des années qu’on n’y avait vu une voile.

Nicoya paraît être de même un assez bon mouillage ; il est situé sur une rivière que les bâtimens de mer peuvent remonter jusqu’à une certaine distance. Le port de Taramindo, qui, selon M. Leconte, se recommande par sa proximité du lac de Leon, a, dit-il, assez d’analogie avec celui de San-Juan du Sud. Pourtant celui de Realejo mérite une attention toute particulière. Juarros, que personne n’a contredit en cela, le caractérise en ces termes : « Il n’y a peut-être pas, dit-il, un meilleur port dans la monarchie espagnole, et dans le monde connu il est bien peu de ports qui lui soient préférables. D’abord il est assez vaste pour que mille vaisseaux y soient à l’abri ; l’ancrage est bon partout, et les gros vaisseaux peuvent venir à quai sans courir le moindre risque. L’entrée et la sortie sont extrêmement faciles, et nulle part on ne rencontrerait une pareille abondance de matériaux de construction[1]. »

Au-delà du lac de Nicaragua, les montagnes se redressent encore une fois, mais l’isthme se rétrécit de plus en plus. Il a d’abord 130 à 150 kilomètres dans la province de Veragua ; sur la baie de Panama, il est à son minimum. À Panama, il n’est que de 65 kilomètres, et à la baie de Mandinga, qui est un peu plus loin à l’est, c’est moins encore[2]. La hauteur des montagnes, de laquelle bien plus encore que de la largeur de l’isthme dépend la possibilité du canal, est très variable dans le long intervalle du lac de Nicaragua au massif de l’Amérique méridionale. D’après le mémoire adressé par M. Wheaton à l’institut de Washington, dans la province de Costa-Rica, attenant à celle de Nicaragua, l’élévation moyenne de la chaîne est d’environ 1,600 mètres ; c’est la hauteur des sommets les plus élevés des Vosges. Dans la province de Veragua, elle paraît atteindre celle des Pyrénées, et un plateau y règne uniformément sur un certain espace ; mais

    être vaincu par des remorqueurs à vapeur ? On avait dit aussi à M. de Humboldt que cette côte était fort orageuse, tandis que d’autres témoignages l’avaient à peu près rassuré sur ce point. Presque tout est entaché de doute sur ces contrées, et elles réclament une minutieuse exploration, presque au même degré qu’il y a trois siècles

  1. Juarros, traduction anglaise de M. Baily, lieutenant de la marine anglaise ; 1823, p. 337.
  2. En 1825, M. de Humboldt estimait le minimum de largeur de l’isthme à 14 lieues marines (78 kilomètres). Les cartes plus récentes réduisent ce minimum assez notablement.