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MANCHESTER.

effet, les femmes commettent, à Liverpool, 51 pour 100 des délits de toute nature, et seulement 43 pour 100 à Manchester. La différence devient encore plus sensible, si l’on s’en tient aux délits qui ont de la gravité ; les femmes, à Liverpool, entrent pour 54 pour 100 dans les faits renvoyés devant les assises, pendant qu’elles ne figurent, à Manchester, dans la même catégorie, qu’à raison de 23 pour 100. On observe une différence analogue entre les deux villes dans le nombre et dans la qualité des jeunes délinquans. Suivant un tableau dressé par M. Rushton[1], les jeunes délinquans renvoyés devant les assises représentent, à Liverpool, 22 1/4 pour 100 du nombre total des prévenus, et 13 3/4 pour 100 à Manchester ; la proportion, à Londres, est de 19 à 20 pour 100. Ce magistrat fait remarquer encore que les récidives, qui sont, à Liverpool, de 36 1/2 pour 100 parmi les détenus adultes, et de 66 pour 100 parmi les jeunes détenus, sont, à Manchester, de 33 3/4 pour 100 dans la première classe, et dans la seconde de 43 pour 100.

La prostitution n’a pas, dans les villes manufacturières, la même hardiesse ni la même publicité que dans les capitales et dans les ports de mer ; pour s’afficher moins effrontément, y est-elle moins répandue ? C’est ce qu’il vaut la peine d’examiner. Les prostituées, à Liverpool, exercent très activement la surveillance de la police. Vols, rixes, tapage, ivresse, on les retrouve dans tous les désordres, et les ennuis qu’elles donnent à la force publique paraissent très clairement dans les rapports de la police, où leur nombre, leurs variétés et leurs moindres délits sont minutieusement relatés. À Manchester, ce qui prouve qu’elles laissent la police assez tranquille, c’est que le nombre même de ces malheureuses créatures est à peine indiqué dans les comptes-rendus, d’après lesquels on ne saurait s’en faire une idée. Ainsi, le rapport de 1840 suppose 285 mauvais lieux, où résident 629 prostituées. Cependant, en parcourant, à l’entrée de la nuit, les seules rues voisines de la bourse, on en rencontrera certainement cinq ou six cents, à quoi il faut ajouter celles d’un ordre un peu plus élevé, qui ne descendent pas jusqu’à provoquer les passans. Un missionnaire, qui s’est livré à une enquête personnelle dans les districts manufacturiers, M. Logan[2], affirme que Manchester renferme 1,500 prostituées.

Dans une reconnaissance nocturne dirigée par M. Beswick à tra-

  1. Juvenile delinquency.
  2. An Exposure of female prostitution.