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LE ROYAUME-UNI ET LE MINISTÈRE PEEL.

n’insista pas pour le moment. Ce fut enfin M. Walter, propriétaire du Times, qui, soutenu par MM. Ferrand, Wakley et Stuart Wortley, fit une nouvelle passe d’armes contre l’ennemie qu’il poursuit depuis plusieurs années, la nouvelle loi des pauvres ; mais 126 voix contre 58 donnèrent raison à la coalition des whigs et des tories modérés contre la coalition des tories exaltés et des radicaux. Peu de jours après, l’élection de M. Walter à Nottingham était annulée pour corruption, et son fils battu par M. Gisborne, à 1839 voix contre 1718. Beaucoup de personnes pensent que ces divers incidens n’ont pas été étrangers à la nouvelle marche du Times et à la guerre toute personnelle qu’il déclara à sir Robert Peel.

Voici donc en résumé quelle était, au moment de la vacance de Pâques, la situation du cabinet. Sa politique en Chine et dans l’Afghanistan avait obtenu l’approbation éclatante des deux chambres, qui de plus lui avaient toutes deux voté des remerciemens pour le traité américain. Les affaires de France s’arrangeaient à son gré, et il pouvait dire, sans crainte d’être contredit, qu’il était parvenu à apaiser l’irritation créée par lord Palmerston, et à rétablir la bonne intelligence entre les deux gouvernemens. À l’intérieur, une majorité plus forte, plus compacte que jamais, venait sanctionner ses mesures de l’an dernier et faire taire les dernières rancunes auxquelles ces mesures avaient donné lieu. Whigs et tories, en un mot tous les journaux s’accordaient à signaler la tranquillité dans les évènemens, l’apathie et l’indifférence dans les esprits. Il n’y avait pas, selon les uns comme selon les autres, une question dans l’air, et la chambre des communes, presque déserte, témoignait assez de la confiance du parti ministériel, du découragement de l’opposition. Moins d’un mois après, la chance avait tourné.

Le premier échec du ministère lui vint d’un projet qui au début lui avait valu, dans la chambre des communes, des complimens unanimes. Avant la vacance, lord Ashley ayant proposé de voter une adresse à la couronne pour que des moyens fussent pris de répandre dans les classes ouvrières les bienfaits d’une éducation morale et religieuse ; sir James Graham s’associa à la pensée de lord Ashley et annonça immédiatement un bill destiné à la réaliser. D’après ce bill, les enfans de huit à treize ans employés dans les manufactures devaient ne travailler que six heures et demie par jour, et en passer trois à l’école. L’état en outre consentait à payer les deux tiers de la construction des écoles, l’autre tiers restant à la charge des souscriptions particulières, Quant aux dépenses d’entretien, elles devaient être