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au profit de l’électeur palatin[1], avait déployé au sein de cette crise une grande hauteur de courage et de génie. Après s’être concilié la Bavière et la Saxe, il réussit, par l’influence de l’Espagne, alors toute puissante à Paris, à obtenir le concours de la France contre un compétiteur dont la moitié de l’empire soutenait les prétentions. Une éclatante ambassade, à la tête de laquelle le Connétable de Luynes avait placé le duc d’Angoulême, fils naturel de Charles IX, se rendit en Allemagne. Ses efforts ne contribuèrent pas peu à la conclusion du traité d’Ulm[2], par lequel les princes coalisés abandonnèrent la cause de Frédéric comme roi de Bohême, se réservant seulement le droit de le soutenir, s’il venait à être attaqué dans ses possessions héréditaires du Palatinat par les troupes autrichiennes. On sait que ce traité amena la perte du palatin, et qu’il ouvrit devant Ferdinand la voie glorieuse dans le cours de laquelle l’attendaient de si grands exemples de l’inconstance de la fortune. L’empereur, victorieux à Prague, reconquit la Bohême, pendant qu’une armée espagnole, agissant pour le compte de la maison d’Autriche, se rendait maîtresse du Palatinat. Une diète réunie à Ratisbonne dépouilla Frédéric de tous ses états pour les attribuer au duc de Bavière, et décréta, dans la constitution territoriale aussi bien que dans les institutions de l’empire, des changemens qui ne laissaient plus à ce grand corps qu’une ombre de liberté. De telles mesures provoquèrent des résistances ; mais, en triomphant de celle-ci, l’empereur puisa des forces nouvelles, et éleva graduellement ses espérances au niveau de ses succès.

Alarmé de l’accroissement de la puissance impériale, le Danemark avait uni ses armes à celles des confédérés protestans ; mais Wallenstein et Tilly n’avaient alors en Europe qu’un rival digne d’eux, et celui-là ne s’était pas encore révélé. L’intervention de Christiern IV dans les affaires de l’empire n’eut pas les conséquences importantes qu’on en avait attendes. Après avoir laissé dix mille soldats sur le champ de bataille de Lutter, il fut heureux de signer un traité dont la politique de Ferdinand s’empressa de lui ménager l’occasion. Le roi de Danemark quitta brusquement l’Allemagne, après avoir abandonné ses alliés à la vengeance de l’empereur, et la paix de Lubeck[3] vint fermer la période danoise de cette guerre, comme la déchéance de Frédéric avait clos sa période palatine.

  1. 5 septembre 1619.
  2. 2 juillet 1620.
  3. 12 mai 1629.