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théâtre, est appelé son maître. Peut-être ne serait-il pas sans intérêt de comparer la physique de Vanini avec celle du célèbre Bolonais. Il nous suffit de reconnaître que l’esprit qui préside aux recherches du premier anime celles de son audacieux et infortuné disciple. Partout le surnaturel est ramené le plus possible au naturel : les présages, les oracles sont expliqués par des causes physiques. Laissons à d’autres le détail. Ce n’est pas le physicien que nous étudions dans Vanini, c’est surtout le philosophe, et nous voulons savoir si ce nouvel ouvrage contient la même philosophie que le précédent. Écartons encore toutes les conjectures et les interprétations diverses des historiens ; n’écoutons que Vanini lui-même. Tout à l’heure nous l’avons vu, en apparence au moins, zélé catholique et défenseur de la divine Providence. Est-il le même ici ? est-il encore chrétien ? Admet-il encore un Dieu ?

Répondons d’abord en disant que deux docteurs de Sorbonne, Édmond Corradin, frère gardien du couvent des franciscains de Paris, et Claude-le-Petit, docteur régent, chargés d’examiner le livre de Vanini, l’ont autorisé sans aucune réserve. Dans l’approbation imprimée, ils déclarent expressément qu’ils n’y ont rien trouvé de contraire ou de répugnant à la religion catholique, apostolique et romaine ; qu’ils le tiennent même comme un ouvrage plein d’esprit et très digne d’être livré au public[1]. Voilà donc la Sorbonne en quelque sorte caution de l’orthodoxie de Vanini. Mais passons plus avant, et considérons le livre en lui-même.

Comme nous l’avons déjà dit, c’est un traité de physique ; cependant la forme est loin d’en être aussi didactique que celle de l’Amphithéâtre. C’est une suite de dialogues où l’auteur, sous le nom de Jules-César, donne à un de ses amis et de ses admirateurs, appelé Alexandre, toutes les explications que celui-ci lui demande sur des phénomènes de physique, en y introduisant bien d’autres choses selon le caprice de la conversation ou selon le dessein de l’interlocuteur principal.

Dans un Avis de l’imprimeur, on lit que ce livre a été dérobé à Vanini, copié et publié sans son consentement, mais non pas malgré lui, l’auteur ayant fini par donner les mains à tout ce qu’on avait fait[2]. Si cette note dit vrai, un ouvrage arraché à Vanini, et publié

  1. Dial. Approbatio. — Rosset, Histoires tragiques, dit que plus tard la Sorbonne fit de nouveau examiner les Dialogues et les condamna au feu. Lui seul parle ainsi sans citer ses autorités. Cette condamnation tardive est une assertion gratuite ; l’approbation est certaine.
  2. Dial.Typographus lectori.