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LA MARINE DES ARABES ET DES HINDOUS.

que l’histoire n’a pas dites, le commerce s’y transporta tout entier, pour s’éloigner ensuite et s’établir définitivement, quoique dans des proportions moindres, à Qosséir, où il est alimenté par les caravanes de Kous et de Kéneh. Quand l’empire des Ptolémées s’allongea sur la côte africaine jusqu’au détroit de Bab-el-Mandeb, d’autres villes parurent parmi lesquelles la plus importante était Adulis (Adoule), assise en face de l’Yémen, de cet heureux et fertile pays dont l’antique capitale était une cité sainte avant l’islamisme. Peu à peu, tout le long de la mer d’Oman, d’Aden au détroit d’Hormuz, les familles arabes, après avoir erré long-temps avec leurs troupeaux, songèrent à bâtir de petites places fortes ; à voir seulement Aden et Mascate, on comprend que ces villes si bien situées pour être défendues ont été fondées non point peu à peu, par agglomération, comme celles qui plus tard entourent d’une muraille leurs maisons groupées au hasard, mais bien sous l’inspiration ambitieuse d’un chef de tribu qui cherchait à se faire sa part. Aussi y en eut-il qui devinrent des repaires de pirates, particulièrement celles qui, placées sur le bord du golfe Persique, pouvaient lancer leurs vaisseaux à la rencontre des flottilles allant des ports de l’Inde à l’embouchure de l’Euphrate, aussi facilement que Tunis et Alger menaçaient les navires européens à leur passage entre l’Espagne et les états barbaresques, entre l’Afrique et les caps de la Sardaigne ou de la Sicile.

Quand l’empire de Mahomet, absorbant toute l’Arabie, s’appuya sur les deux golfes, les Sassanides, subitement coudoyés le long de l’Euphrate par une puissance nouvelle, possédaient encore et les grandes villes des temps passés, et les grandes villes des temps présens ; mais, deux siècles plus tard, les khalifes Abassides, maîtres des plus belles et des plus célèbres contrées du monde, ayant transporté la capitale de leurs immenses états là où s’étaient élevées successivement celles des Babiloniens, des Assyriens, des Syriens et des Parthes, le golfe Persique devint, aux dépens de la mer Rouge, ce qu’il avait dû être primitivement, la route par laquelle arrivèrent les richesses, de la Perse, de l’Inde, de la Chine, en un mot celle qu’avaient suivie jadis les navigateurs de l’Orient, attirés au bas du fleuve par le luxe de Ninive, de Babylone, de Séleucie, de Ctésiphon. À mesure que l’islamisme s’étendit sur la rive opposée du golfe et s’avança dans l’Inde, des relations plus intimes s’établirent entre les peuples de l’Arabie et ceux du Gouzerate, de Cambaye, du Deccan ; peu à peu toute la côte occidentale de la presqu’île indienne se trouva engagée, avec les ports situés sur la mer d’Oman et à l’entrée des