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sabeth, à former une opposition, peu nombreuse d’abord, mais qui, par son exaltation et son audace, devait rallier tous les mécontentemens en les irritant davantage. Le premier parlement convoqué par Charles Ier subordonna au redressement de ses griefs le vote des subsides qui lui étaient demandés ; Charles les voulait sans conditions. Assembler un parlement pour le réduire à une obéissance muette était un non-sens ; autant valait lever directement l’impôt sans avoir recours à une formalité que l’on voulait rendre illusoire. Charles Ier l’essaya. Les nécessités de la guerre qu’il soutenait contre la France l’obligèrent cependant à recourir à de nouvelles chambres, qui lui arrachèrent, dans l’acte célèbre connu sous le nom de pétition des droits, la reconnaissance solennelle des priviléges populaires ; mais il se tint pour délié de ses engagemens dès qu’il ne fut plus lié par ses besoins. Les ressources qu’il tira de la contribution forcée du ship-money, jointes aux monopoles, lui permirent de gouverner onze ans sans parlement. La cause de la royauté absolue semblait gagnée, lorsque l’insurrection de l’Écosse, dont Charles avait violemment blessé la foi presbytérienne, le contraignit à capituler encore avec son peuple et à réunir une chambre qui fut le long parlement. La fermeté de celui-ci qui puisait dans le ressentiment des déceptions antérieures la résolution inflexible de faire triompher les droits du pays, l’obstination et la duplicité de Charles Ier, remirent à la force la décision du débat, et la victoire du peuple fut consacrée par cette extrémité terrible, le supplice de Charles Ier, qu’Horace Walpole appréciait avec justesse peut-être, lorsque, sur l’arrêt de mort du malheureux roi, dont il conservait la minute parmi ses curiosités de Strawberry-Hill, il écrivait ces mots presque aussi impitoyables que la sentence régicide : major charta !

M. Macaulay n’a pas retracé dans ses essais la figure de Cromwell et les grandes scènes qu’elle domine. Dans le progrès des institutions constitutionnelles de l’Angleterre, le protectorat est une halte durant laquelle la nation s’efface dans la stupeur. Le dernier effort avait été trop terrible pour n’être pas suivi de lassitude et comme d’effroi. Ces coups, qui portent si loin dans l’avenir, impriment toujours un recul au présent. Le protectorat de Cromwell ne marque que dans l’histoire de la politique extérieure et coloniale de l’Angleterre ; il a aussi laissé des traces ineffaçables dans les rapports de ce pays avec l’Irlande. Le but de Cromwell à l’égard de l’Irlande, mais il n’eut pas le temps de l’atteindre, était d’y substituer une population anglaise à la race indigène par le moyen épouvantable de l’ex-