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REVUE. — CHRONIQUE.

La révolution grecque a pris le bon parti : elle ne fait pas parler d’elle. Jusqu’ici, du moins, tout se passe paisiblement, et les Grecs paraissent avoir entrepris l’œuvre de leur constitution en hommes graves et sérieux. Il est juste d’ajouter que le roi Othon n’a rien fait qui puisse alarmer le pays. Il persiste à se montrer prêt à accepter toute constitution qui conciliera dans une juste mesure les libertés publiques avec les prérogatives de la couronne.

Les troubles des légations semblent définitivement apaisés. On attend sous peu l’arrêt de la commission chargée de juger les hommes qui ont pris part à l’insurrection. Tout commande au gouvernement pontifical une extrême indulgence. Il ne peut pas ne pas reconnaître ce qui est notoire en Europe : les désordres sont dus presque exclusivement aux vices et aux abus de l’administration locale. Ces vices, ces abus, ont disparu dans les autres états d’Italie, et tous ces pays sont parfaitement tranquilles ; ce qu’on avait dit du Piémont n’était qu’une fable grossière. Il n’y a pas eu dans les états sardes l’ombre même d’agitation politique. Ce serait trop pour le gouvernement pontifical que de s’obstiner à ne pas réformer l’administration locale et de punir cruellement les désordres dont elle est la cause principale. Au surplus il faut le répéter, c’est là un point qui intéresse également tous les gouvernemens de la péninsule, et on peut dire tous les gouvernemens de l’Europe, car l’Italie ne serait pas profondément agitée sans que la paix générale s’en trouvât plus ou moins compromise. Il faut sans doute respecter l’indépendance de chaque état quelles qu’en soient l’étendue et les forces, le droit est le même pour tous ; mais il est une influence morale, amicale, qui n’est nullement interdite entre voisins. Lorsque notre maison peut en être incendiée, il est certes permis de prier le voisin de mieux régler les feux de la sienne. Les gouvernemens des grands états n’épargnent pas aux gouvernemens des états de second et de troisième ordre les insinuations, les avis, les conseils, disons même les conseils les plus pressans, les plus influens, ces conseils qui, à la forme près, ressemblent fort à des injonctions, lorsqu’il s’agit de prévenir un trouble ou de réprimer une insurrection. On ne dit pas alors que ces démarches portent atteinte à l’indépendance des états. Pourquoi tant de délicatesse et de retenue lorsqu’il importe de faire cesser d’autres désordres qui donnent ensuite naissance aux insurrections ? Pourquoi tant de colère et de sévérité pour les effets, et tant d’indulgence et de respect pour les causes ?

Les affaires d’Irlande en sont toujours au même point. Après ces petits débats judiciaires, ces questions de procédure qui nous ont fait tout à coup assister à une représentation des Plaideurs, lorsque nous pensions être conviés aux solennelles grandeurs et aux profondes émotions de la scène tragique, nous assistons maintenant à une querelle que nous sommes hors d’état de juger, à un débat qui est également sans grandeur et sans dignité. Est-il vrai que le gouvernement anglais ait cherché à pactiser avec O’Connell pour le déterminer à renoncer à l’agitation ? Que penser des déclarations d’O’Connell