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TENDANCES COMMERCIALES DES ÉTATS-UNIS.

recettes qui eussent été le fruit d’impôts modérés. On a voulu garder le pays contre son propre entraînement à une consommation exagérée de marchandises étrangères. On a laissé francs de droits le café et le thé, qui auraient pu devenir deux grandes sources de revenu, parce qu’on les a considérés comme des substances alimentaires d’un usage général, et dont le prix pouvait influer sur le taux de la main-d’œuvre. Pour être conséquent, le congrès eût dû modérer les droits sur les vins, afin que l’usage n’en fût pas seulement réservé à la fortune.

Le tarif a été établi dans le but de développer le travail industriel, et, dans ce sens, il est particulièrement favorable à la région du nord-est et à l’état de Virginie appartenant à celle du sud-est, et qui, par l’activité et le génie de ses habitans, est placé d’une manière avancée dans toutes les branches de la production. On a accordé aux états du sud-ouest leur part de protection par l’impôt du sucre brut, maintenu à deux cents et demi par livre, ou 60 à 75 pour 100 sur le coût primitif dans les colonies étrangères ; à ceux du centre et du nord-ouest, par la répulsion des spiritueux étrangers, par la taxe élevée de tous les produits agricoles. On leur a assuré encore des avantages indirects par les consommations obligées des travailleurs des autres états.

Les États-Unis, tout en se le dissimulant à eux-mêmes, sont entrés cette fois d’une manière plus ferme dans le système commercial adopté par toutes les nations de l’Europe, le système de protection au travail industriel et agricole de l’intérieur, voie dans laquelle ils s’étaient placés dès leur origine à l’égard de leur système maritime. Heureusement pour eux, ils se sont arrêtés à des tarifs élevés sans recourir à la prohibition, la pire de toutes les protections, car elle engourdit au lieu d’avertir et d’exciter. S’ils persévèrent, il est hors de doute qu’ils devront demander aux contributions des divers états, par l’impôt de la propriété, par l’accise ou les taxes locales, les moyens de pourvoir aux dépenses du gouvernement fédéral et à la défense commune. Le temps ne peut être éloigné où la douane produira si peu, qu’alors se révélera la nécessité de compter avec le collecteur des taxes. Le lien qui réunit les diverses parties de l’Union devra, dans cette circonstance, être rendu encore plus solide et plus puissant. Ce résultat ne sera pas atteint sans de vives résistances ; le tarif n’est populaire dans le sud-est, le sud-ouest et le nord-ouest, que pour le petit nombre d’articles que ces pays étendus peuvent fournir. On ne peut s’y figurer que le manufacturier du