Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 2.djvu/920

Cette page a été validée par deux contributeurs.
914
REVUE DES DEUX MONDES.

nemi dans un des combats que les troupes du roi Casimir ont soutenus contre les Ottomans.

III. — BIBLIOTHÈQUE DES FRÈRES POLONAIS. — CRITIQUE
ET PHILOSOPHIE SOCINIENNES.

La doctrine des deux Socin est renfermée dans les livres de Faustus, qui forment les deux premiers volumes de la Bibliothèque des Frères polonais, éditée par Wissowats, à Amsterdam, vers le milieu du xviie siècle[1]. Cette collection énorme se compose presque tout entière, si l’on excepte deux ouvrages de Faustus, Jésus sauveur des hommes et le Livre sur les Devoirs de l’homme chrétien, de traités et de commentaires sur les passages de l’Écriture qui fournissaient il y a trois cents ans, dans les écoles protestantes, le texte des plus vives controverses. C’est de la plume de Faustus que sortirent les plus remarquables de ces écrits, publiés au nom des synodes sociniens, et notamment le fameux Catéchisme de Racovie, auquel, après sa mort, ses disciples mirent la dernière main, et qui reproduit les principes développés dans les livres de Lélio. Bien que jusqu’à ses derniers instans Faustus se soit efforcé de se rattacher au christianisme, il est le père véritable de l’exégèse allemande, cette mortelle ennemie de la lettre chrétienne, qui a de nos jours atteint son expression la plus subtile dans la Vie de Jésus, par le docteur Strauss. Au xviie siècle déjà, on ne songeait plus à contester l’influence qu’il a exercée sur les commentateurs modernes ; nous n’en voulons pour preuve que la grande polémique dont sa méthode critique a fourni le sujet entre Bossuet et Richard Simon. Quant aux livres de Lélio, c’est à peine s’il est possible aujourd’hui d’en retrouver quelques fragmens dans ces vastes nécropoles bibliographiques, où de patiens érudits ont péniblement rassemblé les titres des œuvres de théologie suscitées en Europe par les querelles du moyen-âge et de la renaissance. Trois écrits pourtant, si l’on s’en rapporte aux suffrages contemporains, méritaient qu’on les préservât d’un si profond discrédit, le Dialogue entre Calvin et le Vatican, où Lélio combattit l’intolérance calviniste, l’Épître aux Genevois, et la Paraphrase du premier chapitre de saint Jean, où il exposait les opinions que Faustus a plus tard soutenues en Pologne au sujet de la divinité du Christ, des sacremens et de la trinité.

De toutes les contrées de l’Europe où firent explosion, il y a plus de trois siècles déjà, les vieilles opinions anti-catholiques, la Pologne, où la persévé-

  1. La première édition de la Bibliothèque des Frères polonais, où sont également contenus les ouvrages des principaux disciples du second Socin, Slichting, Crellius, Wissowats, Wolzogue, etc., formait huit volumes in-folio. On peut, si l’on désire savoir à quoi s’en tenir sur la prodigieuse fécondité des écrivains de la secte, consulter la Bibliothèque des Anti-Trinitaires (Bibliotheca Anti-Trinitariorum), de Christophe Sandius.