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VOYAGE AUTOUR DU MONDE.

dernier comptoir allait dépérissant, Mazatlan réalisait en très peu d’années une belle fortune commerciale. En 1828, on y voyait à peine quelques huttes misérables habitées par des pêcheurs ; aujourd’hui c’est devenu une ville de cinq mille ames, un entrepôt important. C’est là que viennent déboucher désormais une grande partie des richesses minérales du Mexique, l’or, l’argent et le cuivre de huit districts, enfin des bois de teinture qui font l’objet d’une exploitation récente. Les habitations de Mazatlan ne sont pas à la hauteur de sa situation actuelle ; il est aisé de voir que la prospérité a pris cette ville au dépourvu. À peine peut-on citer sept ou huit habitations de quelque importance ; le reste ressemble aux chaumières d’un hameau. Celles qui bordent la plage reposent sur le sable, et pour aller de l’une à l’autre, comme pour arriver à la rue principale, on est obligé de marcher dans une arène mouvante. Le comptoir n’en est pas moins riche et florissant ; des maisons importantes s’y sont fixées et en ont fait le siége de vastes opérations. Cette population, d’origine espagnole, est mêlée de quelques négocians étrangers. Elle fit à la Vénus un accueil qui laissa chez nos marins de longs souvenirs. Les bals, les fêtes, les réunions, les dîners se succédaient sans relâche. Pour répondre au vœu des habitans, il avait fallu rapprocher la frégate du port et la conduire au mouillage de l’île de Creston. Elle y reçut des visites qui ne cessèrent qu’au jour du départ.

Il est impossible de suivre la Vénus dans toutes les échelles du Mexique : à San-Blas, ville en décadence et ravagée par des fièvres intermittentes ; à Acapulco, où arrivait autrefois le célèbre galion des Philippines, et dont la baie est une des plus sûres qui existent dans cette zone. La frégate revit encore le Pérou et le Chili, où elle procéda aux grosses réparations dont elle avait besoin. À Valparaiso, le capitaine du Petit-Thouars fut invité à une chasse au condor, ce destructeur des troupeaux, et il donne de curieux détails sur ces parties de plaisir.

Le condor, le plus grand des oiseaux de proie, est originaire des Andes et se tient ordinairement au-dessus de la limite extrême de la végétation. Au Chili, il a de quinze à vingt pieds d’envergure ; son plumage est noir, la peau de sa tête a un aspect hideux ; elle est ridée, ainsi qu’une partie du cou, et couverte d’un poil noir et rare ; un collier d’un beau duvet blanc la sépare de la partie emplumée du cou. Le bec du condor est terrible ; ses serres sont puissantes, mais pas au point de pouvoir enlever des bestiaux, comme l’ont prétendu quelques voyageurs. Le condor recherche les ani-