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et sardonique, comme s’il m’eût dit : Allez au diable ; puis, me prenant par le bras, il me fit monter de force l’escalier d’une maison qui portait un écriteau de location. La maîtresse nous céda pour une journée une chambre qui donnait sur la rue, et là nous nous établîmes fort tranquillement, une écritoire devant nous, tout prêts à copier sur place les évènemens d’un drame qui promettait plus d’une péripétie et qui tint parole. Les colonnes du Morning Chronicle continrent, dix jours après, le détail circonstancié des scènes qui se déroulèrent devant nous. »

L’autopsie des classes inférieures de la société espagnole, telle que M. Borrow l’a donnée, enseignement bien grave pour les hommes politiques, explique mieux que ne pourraient le faire mille dissertations théoriques la difficulté de soumettre à un régime normal, uniforme et constitutionnel, ces étranges et réfractaires élémens.

Un autre livre de voyages, dont le succès est d’ailleurs soutenu par des gravures magnifiques, flatte singulièrement le patriotisme des Écossais. On sait l’amour qu’ils portent à leur patrie, amour justifié d’ailleurs par ses beautés pittoresques et par les chefs-d’œuvre qu’elle a produits ou inspirés. Dans tous les romans de Walter Scott, il n’y a qu’un seul héros, l’Écosse ; un sentiment exclusif, la patrie écossaise. Plus habile à ménager ses intérêts que l’Irlande, et unie à l’Angleterre par le sentiment religieux, l’Écosse a su conserver à la fois ce qu’elle pouvait espérer ou réclamer d’indépendance, et ce qu’elle avait d’appui à recevoir de sa puissante sœur. Au lieu de se laisser écraser par la supériorité du pays voisin et de dépenser sa force dans une lutte acharnée et une haine stérile, l’Écosse a tiré parti des circonstances avec adresse. Reléguée par la nature sur un point assez triste et assez âpre des trois royaumes, loin de la civilisation méridionale, une nation qui a produit des hommes tels que Wallace, Knox, Allan Ramsay, Walter Scott, Burns, Dugald Stewart, Ferguson, Robertson, a droit de réclamer une place glorieuse parmi les nations civilisatrices. Tout cela n’empêche pas quelques-unes des prétentions écossaises d’être réjouissantes pour les étrangers. Les compatriotes de Walter Scott ne sont pas fiers seulement de leur courage, de leur esprit, de leur poésie, de leurs lacs et de leurs forêts ; ils sont persuadés que leur soleil est chaud, et que leur climat, sous ce rapport, vaut l’Italie ou l’Espagne. « Nous jouissons d’un climat très doux et très salubre, disait récemment la Revue d’Édimbourg, également éloigné des feux du tropique et des rigueurs du pôle. » Salubre, à la bonne heure ; on peut ajouter même que cet air