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LITTÉRATURE ANGLAISE.

M. Vaughan il faut joindre le capitaine Hamilton, M. Torrens et M. Chadwick, dont le rapport récent sur la condition sanitaire de la population anglaise est très remarquable en ce qu’il prouve l’accroissement énorme de la mortalité dans les cantons manufacturiers. « Le typhus, dit ce statisticien, attaquant des personnes dans la vigueur de l’âge, tue annuellement en Angleterre et dans le pays de Galles deux fois plus d’ouvriers que les armées alliées n’ont perdu de soldats à la bataille de Waterloo[1]. » Ainsi l’industrie, comme toutes les puissances nouvelles, demande non à être supprimée, mais à être réglée et organisée. D’après les exemples que présentent le canton de Neufchâtel en Suisse et les provinces florissantes de l’Angleterre, il semblerait que le mélange des travaux manufacturiers et des travaux agricoles fût l’un des moyens les plus efficaces de civilisation et de bien-être. Par une habile répartition des forces humaines et de leur emploi, par une organisation savante et éclairée des métiers et des salaires, on ferait plus de bien aux populations, on préviendrait plus de révolutions et d’émeutes, on guérirait plus de misères douloureuses et de plaies envenimées que par les remaniemens éternels des constitutions et des lois.

C’est ce que comprennent les plus habiles et les plus sages des écrivains politiques en Angleterre ; telle est leur tendance sérieuse et louable. Ils cherchent des améliorations positives et s’éloignent de la double illusion produite par la menteuse exactitude des chiffres si faciles à grouper et par la déception des utopies. Burke lui-même, pour être écouté aujourd’hui, serait forcé de quitter le trépied de la pythonisse, et Malthus ne serait plus tenté de se perdre dans le labyrinthe de ses logarithmes statistiques. Ces rapports, ces examens, ces enquêtes sévères, constituent la portion la plus importante des publications anglaises actuelles, et laissent bien loin derrière eux, pour l’intérêt et la valeur intrinsèque, les fruits, en général assez fades, de la littérature proprement dite, de la poésie, aujourd’hui épuisée, et de l’érudition classique. Dans le dernier de ces domaines, une dissertation sur Homère s’est distinguée récemment par l’incroyable bizarrerie des vues et des hypothèses. Le docteur Williams, archidiacre de Cardigan, vient de soutenir en un volume sérieux que le véritable auteur de la Bible c’est Moïse[2].

Nous savions bien que, selon Wolff, Homère n’a jamais existé, ou

  1. Report, p. 3.
  2. Homerus, by the Rev. John Williams, etc. — Edinburgh.