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MARIA.

Qu’Euphorbe si charmant, la tête renversée,
Boive aux murs d’Ilion la sanglante rosée,
C’est un jeune olivier au feuillage léger,
Qui, tendrement nourri dans l’enclos d’un verger,
N’a connu que vents frais et source qui s’épanche,
Et, tout blanc, s’est couvert de fleurs à chaque branche ;
Mais d’un coup furieux l’ouragan l’a détruit :
Il jonche au loin la terre, et la pitié le suit.

Quand une vierge est morte, en ce pays de Grèce,
Autour de son tombeau j’aperçois mainte tresse,
Des chevelures d’or, avec ces mots touchans :
« De l’aimable Timas, ou dÉrinne aux doux chants,
La cendre ici repose : à l’aube d’hyménée,
Vierge, elle s’est sentie au lit sombre entraînée.
Ses compagnes en deuil, sous le tranchant du fer,
Ont coupé leurs cheveux, leur trésor le plus cher. »

Et que fait parmi nous, dans sa ferveur sacrée,
Héloïse elle-même, Amélie égarée,
Celle qui, sans retour, va se dire au Seigneur,
Que fait-elle d’abord que de livrer l’honneur
De son front virginal au fer du sacrifice,
Pour être sûre enfin que rien ne l’embellisse,
Que rien ne s’y dérobe à l’invisible Époux ?
Du rameau sans feuillage aucun nid n’est jaloux.
Or, puisque c’est l’attrait dans la belle jeunesse
Que ce luxe ondoyant que le zéphyr caresse,
Et d’où vient jusqu’au sage un parfum de désir,
Je veux redire ici, d’un vers simple à plaisir,
Non pas le jeu piquant d’une boucle enlevée,
Mais sur un jeune front la grace préservée.

« J’étais, me dit un jour un ami voyageur,