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ce qu’on y cherche, et on n’y cherche que ce qu’on a déjà en soi. Chaque artiste a son ton général, non-seulement dans sa couleur mais aussi dans tout le reste ; et ceux qui passent pour les plus créateurs n’ont guère fait que se répéter. Il en est peu qui aient inventé plus d’un type de tête. Ils ont beau vouloir s’en écarter, ils y retombent toujours. Si M. A. Leleux passe un jour d’Espagne en Italie, il y trouvera aussi la Bretagne, car il verra les Italiens des mêmes yeux qu’il a vu les Bretons. Ceci n’est point un blâme ; ce serait plutôt un éloge. La couleur a sensiblement gagné en éclat et en effet ; malheureusement elle manque encore de solidité et de nerf ; c’est moins de la couleur qu’un joli bariolage. Avec tout cela, cette composition est attachante par la douceur et la naïveté du sentiment qui y domine ; ce sentiment est le côté original de la manière de M. A. Leleux, et s’il y a parmi nos peintres des talens plus forts, plus brillans, plus hardis et plus complets, il n’y en a pas certainement de plus aimable.

Nous serons très sobre de citations de tableaux de genre, précisément parce qu’ils abondent. L’Atelier d’un peintre, les Chanteurs navarrais et la Guirlande de fleurs sont les seuls trois morceaux qu’on regarde plus d’une fois ; à moins qu’on ne veuille y ajouter les Templiers, de M. Granet, scène d’intérieur exécutée avec la vigueur de touche qui caractérise ce maître, mais dont le mérnite est maintenant trop prévu pour exciter beaucoup d’intérêt.

Il y a dans les Condottieri de M. Baron quelque chose qu’on pourrait appeler du marivaudage de coloris. Et ceci serait flatteur, car le marivaudage est une charmante chose, surtout dans Marivaux ; par malheur il y a quelque chose de plus visible, c’est le pastiche. Il a emprunté des couleurs à tous ceux qui passent pour en avoir, à Decamps, à Isabey, à Lepoitevin, à Delacroix et autres, et les a mises sur sa toile côte à côte, sans doute pour que les prêteurs pussent reconnaître leur bien et le réclamer au besoin. Ce petit morceau ne laisse pas cependant que d’être agréable. M. Lepoitevin a représenté le peintre Van de Velde placé sur un grand canot, peignant d’après nature un combat naval. Cette peinture est extrêmement soignée, lissée, proprette, en un mot prête à livrer. Cette coquetterie est du reste justifiée par des qualités réelles.

Avec de bonnes études faites sur les ouvrages de M. Henri Scheffer, de M. Destouches, de M. Jacquand et autres maîtres de l’école du drame larmoyant, on peut arriver à composer un tableau comme les Derniers conseils d’un père, de M. Hunin. Cette peinture va à l’adresse