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LE SALON.

4o  Les conditions auxquelles on pourrait soumettre les exposans.

Quant à la composition du jury, il faut repousser directement toute idée de substitution d’un jury à un autre ; celui qui existe serait difficilement remplacé. Quelques esprits irréfléchis ont pu rêver un jury électif, pris dans la masse des artistes, ou telle autre combinaison de ce genre. Il est fort heureux qu’on ne veuille pas les écouter, et qu’ils ne puissent pas parvenir à s’entendre. On peut affirmer hardiment qu’il serait impossible de trouver ailleurs qu’à l’Académie des Beaux-Arts une réunion de trente-quatre artistes dont le nom, les précédens, les services, la gloire, le talent et la science pussent surpasser celle-ci en considération, et offrir plus de garanties pour les lumières et l’indépendance. On pourrait faire un jury qui n’aurait pas les mêmes préjugés, les mêmes préoccupations systématiques, les mêmes passions et les mêmes faiblesses, mais il en aurait d’une autre espèce, et certainement non moins incommodes ; il manquerait surtout d’une chose très précieuse et qui ne s’improvise pas, la force d’opinion, l’autorité. C’est là ce qu’il importe de conserver à tout prix. Le personnel actuel devrait donc, dans toute hypothèse, être maintenu comme base fondamentale de tout jury. Il ne peut être question de le changer, mais seulement d’en modifier l’esprit et les habitudes, qui ont pris une tendance trop exclusive. Pour cela, il n’est d’autre moyen que l’introduction de quelques élémens étrangers, c’est-à-dire les adjonctions ; on ne peut, en effet, y faire pénétrer, en juste proportion, un esprit nouveau que par des hommes nouveaux. Mais ces hommes nouveaux, où les prendre ? Ici commencent les difficultés. Il ne serait pas impossible pourtant de constituer, en dehors de l’Académie, une catégorie d’artistes établie sur des conditions déterminées d’âge, de titres acquis, de notabilité fondée sur des faits matériellement appréciables, tels que récompenses publiques, participation aux travaux des monumens nationaux, la décoration, etc. C’est dans ce personnel nouveau qu’on pourrait, tous les ans, tirer, par la voie du sort, un certain nombre de noms entre lesquels le roi prendrait ceux qu’il jugerait à propos de choisir comme membres du jury. Nous laissons de côté tout détail d’exécution ; nous savons et nous avouons que ce mode de procéder a des difficultés ; tous ceux qu’on proposera en auront, et, ce qui est plus regrettable, aucun n’aura de grandes probabilités de réussite. Que deviendraient ces nouveaux élémens en présence des anciens, et comment s’accorderaient-ils ? Toutes ces questions dépassent la portée de nos prévisions. Tout ce que nous pourrons dire, c’est d’une part que, si on veut changer