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REVUE. — CHRONIQUE.

nir ; aussi sommes-nous plus affligés que surpris de voir que malgré les louables tentatives de nos prédécesseurs pour ramener les dépenses au niveau des recettes, et malgré l’accroissement rapide des revenus de l’état, les quatre exercices de 1840 à 1843 se balancent encore par des déficits considérables. Nous venons de rappeler les sacrifices réclamés en 1840 dans l’intérêt de la dignité et de la puissance de la France ; tâchons d’en tirer quelques enseignemens pour l’avenir. À Dieu ne plaise que nous nous alarmions de la situation de nos finances !… Mais si des circonstances analogues à celles qui se produisirent inopinément en 1840 nous surprenaient ?… N’oublions pas que, si le trésor a pu facilement pourvoir aux nécessités de 1840 et de 1841, c’est que les budgets de 1838 et 1839 étaient non-seulement en équilibre, mais qu’ils léguaient aux exercices suivans 31 millions 244,184 fr. d’excédant… Aujourd’hui où sont nos réserves pour y puiser aux jours difficiles ? Mais que parlons-nous de réserves, lorsque, malgré la situation prospère du pays, malgré l’accroissement successif des revenus de l’état, nos dépenses ordinaires suivent une progression que nos recettes ne peuvent plus atteindre ? Un pareil état de choses pourrait-il se continuer ? Nous ne le pensons pas Nous conjurons donc le gouvernement de résister à cet entraînement, qui porte fatalement vers les dépenses ; nous le conjurons d’amener l’équilibre dans les budgets, de n’entreprendre de nouveaux travaux qu’avec une extrême réserve, de résister à toutes les demandes qui ne se recommandent pas par un puissant et pressant intérêt général. »

C’est là, nous en tombons d’accord, un exorde on ne peut pas plus pertinent pour un rapport où l’on propose des réductions pour la somme totale de 25 millions, ce qui réduirait, pour l’année 1844, l’excédant des dépenses ordinaires à un peu moins de 15 millions, et l’excédant pour travaux extraordinaires, à 37 millions.

Certes la chambre ne saurait mieux faire que de tenir grand compte des propositions de sa commission, et de prendre en sérieuse considération ses sages conseils. Il n’est pas moins vrai que les motifs tirés de l’état de nos finances ne doivent pas seuls déterminer des hommes politiques. M. Bignon l’a dit : un intérêt général et pressant peut l’emporter sur les considérations financières et commander certaines dépenses, dussent-elles retarder quelque peu la complète liquidation de l’arriéré. Apprécier au juste la situation du trésor et les circonstances politiques du pays, faire à chaque chose sa part et trouver ainsi le point où les divers intérêts se concilient, c’est un travail difficile, délicat, que rendrait impossible toute préoccupation exclusive, tout désir trop ardent d’atteindre promptement un certain but particulier. La commission voulait, avant tout, diminuer l’excédant des dépenses ; on ne peut qu’applaudir à cette résolution. Elle propose dans ce but un grand nombre de réductions plus ou moins considérables ; nous n’avons rien à en dire. Elle a été jusqu’à retrancher la paie d’un garçon de bureau (900 fr.) du budget du conseil d’état. Soit. L’état n’en périra pas ni le conseil non plus. Mais elle a refusé d’améliorer la position par trop fâcheuse d’une partie de nos desservans : ici la sévérité commence à devenir excessive. Elle propose une ré-