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LE MONDE GRÉCO-SLAVE.

nationaux et de te prêter assistance. 7o  Les sénateurs auront des appointemens convenables, que tu fixeras d’accord avec eux ; aucun règlement ne pourra être adopté, aucune nouvelle imposition prélevée sans leur approbation ; le cercle de leur activité embrassera les sujets suivans : décider en matière de justice, d’impôt et de législation du pays, fixer les rétributions de tous les employés, et créer de nouveaux emplois, si le besoin s’en fait sentir ; évaluer les dépenses annuelles de l’administration, et chercher la manière la plus avantageuse de répartir et de percevoir les contributions ; déterminer le nombre, la paie, le service des troupes de garnison chargées de maintenir la paix dans le pays ; exiger des trois ministres un compte annuel détaillé de leur administration ; enfin rédiger, adopter à la majorité des voix, et présenter à ta ratification toute ordonnance quelconque qui leur semblera utile, à condition qu’elle ne porte aucune atteinte aux droits de suzeraineté de ma Porte, à qui le pays appartient. 8o  Les sénateurs ne pourront être destitués qu’en cas d’infraction aux lois du pays, et en vertu d’un jugement ratifié par ma Porte. Les trois hauts dignitaires du gouvernement et le directeur de la chancellerie princière font de droit partie du sénat. Un kapou-kihaia de la Serbie, envoyé par ses concitoyens, résidera en permanence auprès de ma resplendissante Porte, pour gérer les affaires de sa nation et mettre mes volontés souveraines d’accord avec les institutions et immunités de son pays… »

Miloch avait écouté, tête baissée, cette constitution décrétée par deux souverains absolus qui, républicains hors de chez eux, le dépouillaient de son autocratie et faisaient entrer le sénat dans la participation de ses droits. « Je ne serais plus Miloch, dit-il tout bas à ses favoris, si je souffrais un tel outrage ; nous verrons ! » Les émigrés, revenus en foule, serraient la main de Vachtchenko et s’embrassaient entre eux. Le peuple ne pouvait oublier cependant que cette charte lui venait des tsars étrangers, des oppresseurs de l’Orient ; il n’y avait pris aucune part, et il n’osait s’y fier. La présence de Vachtchenko à cette lecture n’avait-elle pas une menaçante signification ? Aussi, malgré les efforts du sénat pour convoquer tous les guerriers ou citoyens de la Serbie, et quoiqu’on eût écrit dans les dix-sept nahias que tout Serbe élu ou non élu par sa commune pouvait assister à la skoupchtina, il n’en était venu que deux ou trois mille. Réunis sur le vaste glacis du Kalémeïdan, les députés accueillirent la lecture de l’oustav par de sourds murmures. — Est-ce donc pour