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LA FLORIDE.

trée, semble disposé, on le voit, pour faciliter le commerce, soit à l’intérieur, soit à l’étranger.

Les mers qui baignent la Floride présentent un phénomène digne de remarque ; elles n’ont pas le même niveau. Les eaux du golfe du Mexique sont bien plus élevées que celles de l’Océan Atlantique. La physique générale du globe explique très bien ce fait. Les vents alisés, qui sous les tropiques soufflent d’orient en occident, refoulent continuellement devant eux les vagues de la mer, et de cette impulsion incessante résulte le grand courant, appelé courant équatorial, qui vient se briser contre les côtes de l’Amérique méridionale. Là, il rencontre, à cinq degrés au sud de l’équateur, le cap Saint-Roch, qui divise sa masse et dirige une partie de ses eaux vers le midi, le long des côtes de l’Amérique. L’autre portion, de beaucoup la plus considérable, se porte vers le nord, parcourt la mer des Antilles, et pénètre dans le golfe du Mexique par le détroit qui sépare le Yucatan de l’île de Cuba. Là, ce courant se dirige d’abord vers le nord et vient battre les rivages de la Louisiane et de l’Alabama, puis il se divise en deux branches l’une se replie vers l’ouest, rase les côtes de la Louisiane et du Mexique, pénètre jusqu’au fond du golfe, et vient rejoindre le courant d’entrée à la pointe du Yucatan ; l’autre se porte à l’est, redescend le long de la Floride et s’échappe dans la mer Atlantique par le canal de Bahama. Ce détroit joue ici en quelque sorte le rôle d’une écluse, et la vitesse du courant qui le traverse est quelquefois de deux lieues à l’heure. Cette branche du courant équatorial prend alors le nom de Gulf-Stream ; elle remonte jusqu’au banc de Terre-Neuve, se replie vers l’est, traverse toute l’Atlantique, et n’est arrêtée que par les côtes de l’ancien continent. Un de ses bras longe les rivages d’Espagne et de France, pénètre dans la Manche, contourne les îles britanniques et se fait sentir jusqu’aux Orcades. Les eaux du Gulf-Stream, échauffées par le soleil des tropiques, présentent une température bien supérieure à celle de nos mers ; aussi exercent-elles une influence remarquable sur les provinces qu’elles baignent. C’est à elles que l’Irlande doit la douceur de son climat ; ce sont elles qui permettent aux myrtes de venir en pleine terre au milieu des rochers qui bordent notre Bretagne.

Ainsi, cette mer méditerranée que nous appelons golfe du Mexique peut être considérée comme un vaste bassin recevant sans cesse les eaux que les vents alisés lui amènent du midi par le détroit du Yucatan, pour les verser par le canal de Bahama. La presqu’île de la Floride semble disposée comme une immense digue destinée à rompre