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LES COLONIES PÉNALES DE L’ANGLETERRE.

travail ; le trafic organisé sur ce pied a été très profitable aux planteurs, aussi long-temps que les demandes ont excédé les approvisionnemens, et il en a été ainsi jusqu’à ces derniers temps.

« L’histoire de la prospérité matérielle à laquelle sont parvenues la Nouvelle-Galles et la terre de Van-Diemen est, sous beaucoup de rapports, au point de vue économique, l’histoire d’une colonie à esclaves ; et comme les colonies à esclaves, en raison de la combinaison des efforts dans le travail forcé, ont vu leur richesse s’accroître plus généralement et plus rapidement que celle des colonies fondées uniquement par des hommes libres qui n’ont pas introduit le principe de l’association dans le travail, de même, dans ces colonies de condamnés réduits à l’état de servage, où les planteurs libres trouvaient non-seulement des esclaves qui ne leur coûtaient rien, mais encore un excellent marché pour leurs produits, on a dû accumuler plus promptement une plus grande somme de richesse que dans aucune autre société de la même étendue. Mais cette prospérité doit-elle se maintenir ? Dans quelle mesure sera-t-elle affectée par la durée ou par le terme de la déportation ? Le marché que le gouvernement a fourni aux colons est très limité ; la somme de travail qu’il peut leur procurer dans la personne des condamnés, a des limites encore plus restreintes. Pendant plusieurs années, il y avait dans la colonie plus de travailleurs que les planteurs n’en pouvaient employer, et le gouvernement accordait divers priviléges à ceux qui consentaient à admettre des condamnés dans leurs établissemens. Bientôt la demande fut égale à l’offre pour le travail des déportés, et le gouvernement n’éprouva plus aucune difficulté à les placer. Dans ces dernières années, la demande a excédé l’offre, et l’on s’est fait concurrence pour obtenir des condamnés. À mesure que le capital augmente, un surcroît de travail est nécessaire pour le rendre productif. Par une conséquence naturelle de la disproportion des sexes, la population dans la Nouvelle-Galles est inférieure au nombre des personnes qui ont débarqué dans la colonie ; le capital, au contraire, s’est prodigieusement accru. Aussi, la Nouvelle-Galles souffre beaucoup faute de travailleurs ; les troupeaux de moutons sont deux fois plus nombreux qu’ils ne devraient être, et il en périt énormément faute de soins. On demande en ce moment 10,000 travailleurs dans la Nouvelle-Galles, et le nombre des condamnés que l’on va diriger sur ce point n’excédera pas 3,000, un nombre à peine suffisant pour remplir les vides que l’émancipation et la mort feront dans leurs rangs. Si donc les colonies pénales continuent à n’attendre que de