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puis 8 heures jusqu’à 10 1/2, et fait les 4 heures qui lui restent de 1 heure 1/2 jusqu’à 5 1/2. La seconde brigade se met au travail à 10 heures 1/2 et y demeure jusqu’à 12 1/2 ; elle revient à 1 heure 1/2, sort à 5 1/2, et fait enfin ses dernières heures de 6 à 8. La troisième brigade remplit les lacunes laissées par les deux autres. Ce dernier système est suivi particulièrement à Manchester. Dans le Lancashire, le Yorkshire, les comtés de Durham, de Cumberland et de Westmoreland, sur 1900 manufactures, 1300 environ ont adopté le système des relais. Les infractions à la clause de la loi qui fixe à 8 heures par jour le travail des enfans de la première catégorie paraissent avoir été peu nombreuses. Dans la plupart des manufactures, les enfans gagnent autant en travaillant 8 heures qu’ils gagnaient auparavant dans une journée de 12 heures, et, proportionnellement, ceux qui sont embrigadés dans les relais de 6 heures ne sont pas moins payés. Dans les filatures de coton, le salaire des enfans qui travaillent 8 heures par jour varie de 1 sh.d. (1 fr. 75 c.) par semaine, à 4 sh.d. (5 fr. 60). À Manchester, au lieu de diminuer d’un tiers comme le travail, les salaires n’ont diminué que d’un sixième (de 3 sh. à 3 sh.d.). Le salaire des enfans au-dessus de 13 ans varie de 6 à 7 sh. par semaine (de 7 fr. 50 c.fr. 75 c.).

Si un sentiment d’humanité, si un intérêt politique commandent au gouvernement de protéger la santé et la vie de l’enfant contre les funestes effets d’un travail excessif, ce n’est pour lui ni un intérêt moins pressant, ni un devoir moins sacré de veiller à la culture intellectuelle et morale des générations nouvelles. Là surtout où les classes ouvrières, plus nombreuses et plus agglomérées, font peser sur la société des menaces de perturbation plus redoutables, il semble que, contre les excès d’une force brutale à laquelle les moyens de défense dont elle dispose n’opposeraient qu’un obstacle insuffisant, la société n’ait de garantie que dans la raison même de ces masses et dans des principes de moralité assez fortement enracinés en elles pour contenir toutes les mauvaises passions que développe leur condition misérable. Les auteurs de la loi anglaise l’ont bien compris ; ils ont voulu que tous les enfans engagés de bonne heure dans la grande industrie reçussent les premiers élémens de l’instruction : ils ont exigé que, jusqu’à l’âge de treize ans, ils assistassent deux heures par jour à l’école, et une clause de l’acte donne même aux inspecteurs le droit de créer des écoles partout où ils le jugeront nécessaire.

Les deux principales institutions qui, en Angleterre, répandent l’instruction parmi le peuple, sont la Société nationale et la Foreign and British School Society. La première compte un grand nombre d’écoles dirigées selon ce que l’on appelle le système national ; beaucoup de ces écoles avaient été établies par des sociétés particulières qui se réunirent, en 1811, dans le but de favoriser l’éducation de la jeunesse selon les doctrines de l’église établie. Cette société, qui dispose de fonds considérables, a institué un très grand nombre d’écoles, où l’instruction est donnée à peu de frais ; ce qui les caractérise, c’est l’usage du catéchisme de l’église anglicane, et l’observation