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SITUATION FINANCIÈRE DE LA FRANCE.

susceptibles de recevoir. Ces travaux seraient ainsi mieux faits, en moins de temps, à moins de frais, et le pays viendrait plus tôt en possession des avantages qu’ils doivent créer. »

Cela serait désirable, en effet. Mais à qui revient la responsabilité des lenteurs que subit l’exécution de ces vastes ouvrages, sinon à vous qui, voulant tout faire à la fois, avez proposé aux chambres de répartir les dépenses sur un plus grand nombre d’années ? Il est utile, il est beau de sillonner le territoire de canaux et de chemins de fer ; nous ne doutons pas que la France fût plus riche et plus puissante, si elle possédait les mêmes conditions de viabilité que l’Angleterre ; et, pour atteindre ce résultat, les sacrifices ne doivent pas nous coûter. Cependant la prudence conseille de n’entamer que les travaux que l’on peut terminer promptement. Le possible est par tout pays la mesure de l’utile ; et, avant de grossir les charges de l’extraordinaire, il faudrait consulter les ressources du trésor.

Les chemins de fer sont éventuellement la charge qui doit peser le plus lourdement sur nos finances. C’est aussi celle qu’une administration prévoyante et modérée pourrait le plus aisément diminuer. Qu’importe que les compagnies qui les exploiteront les prennent à bail pour cinquante ans, ou qu’elles obtiennent une concession de quatre-vingt-dix-neuf ans ? La fortune publique est intéressée au succès des chemins de fer, et non pas à ce que l’état devienne propriétaire quelques années plus tôt d’une voie de transport dont il sera toujours obligé d’affermer l’exploitation. S’il y a donc un moyen d’appeler les capitaux particuliers et l’industrie privée à prendre la place de l’état dans l’exécution, on devra considérer ce résultat comme un double bienfait, en ce qu’il épargnera, au trésor des dépenses qui finiraient par l’accabler, et en ce qu’il secondera le développement de l’esprit d’association si nécessaire à la grandeur et à la prospérité de la France.

Ce moyen est connu, et l’expérience en a déjà montré la valeur. Il consiste à prêter ou à donner aux compagnies exécutantes le crédit de l’état au lieu de l’argent du trésor. C’est la garantie d’un minimum d’intérêt, système qui a déterminé l’achèvement du chemin de fer entre Paris et Orléans, et à l’aide duquel, ou nous nous trompons fort, cette compagnie a proposé, sans qu’on daignât l’écouter, de pousser jusqu’à Montereau l’embranchement de Corbeil.

Nous croyons fermement qu’en accordant la garantie d’un minimum d’intérêt de 4 pour 100 aux capitaux qui s’engageraient dans les chemins de fer, et en autorisant la caisse d’épargne à prêter, au