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pas le moins important, consiste à déclarer acquises toutes les extinctions de dépenses, et à n’autoriser aucune entreprise nouvelle, tant que le gouvernement n’aura pas terminé celles qui sont en cours d’exécution. Dans cet ordre d’idées, il faudrait sévèrement blâmer le cabinet qui, avant d’avoir commencé la colonisation de l’Algérie et d’en avoir achevé la conquête, va s’emparer des îles Marquises, et surcharge ainsi le budget d’une allocation annuelle de 2 millions.

Il serait bien temps aussi de mettre un frein à cette accumulation d’entreprises à laquelle se livre aujourd’hui le ministère des travaux publics. À chaque session, ce département ministériel accouche de quelque nouveau projet. Avant d’avoir terminé ses routes, il veut ouvrir des canaux ; il fait des canaux avant d’avoir rendu navigables les rivières auxquelles cette navigation artificielle doit se lier ; et, pendant que tant de travaux absorbent ses crédits et occupent ses ingénieurs, il a de plus la prétention d’exécuter les chemins de fer. Dans les chemins de fer encore, il ne se contente pas de deux ou trois grandes lignes, il lui faut un réseau de huit à neuf cents lieues. Rien ne peut se faire dans le pays qu’il n’y mette la main, et jamais monopole ne fut plus universel.

Qu’arrive-t-il ? Les 122 millions, que lui allouait le budget de 1843, ne suffisent déjà plus. Il veut que tout marche de front, et partout l’exécution se ralentit. Le trésor, fatigué des appels incessans qui lui viennent de ce côté, referme ses coffres ; de là, les doléances suivantes qu’on lit, dans le budget, au chapitre des travaux publics. « Il est douloureux pour l’administration d’entendre accuser à chaque instant la lenteur de ses opérations, lorsque cette lenteur tient presque uniquement à l’insuffisance des crédits annuels dont elle peut disposer. Elle s’est vue, en 1842, dans la pénible obligation de fermer une partie des chantiers du canal de la Marne au Rhin, et de licencier une foule d’ouvriers précisément à l’époque de l’année où elle aurait employé leurs bras avec le plus de succès : et cependant le crédit total affecté à l’ouverture du canal était loin d’être épuisé ; mais le crédit spécial de l’année était consommé. Il serait bien à désirer, pour des entreprises de ce genre dans lesquelles la célérité est à la fois une cause d’économie et de succès, il serait bien à désirer, disons-nous, que tant qu’elle n’a pas excédé les limites de l’allocation totale que les chambres ont votée, l’administration pût toujours proportionner ses ressources à l’activité que les travaux sont