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ration de la Walhalla. Telles furent les dispositions, longuement et sagement méditées, par lesquelles on préluda à la construction de l’édifice. Cependant, tout ce que l’Allemagne renferme d’habiles statuaires était occupé à sculpter les bustes et les statues en marbre blanc, et un seul de ces statuaires, Martin de Wagner, qui avait reçu pour sa part un immense bas-relief de deux cent vingt-quatre pieds de développement, faisait exécuter à Rome, sous ses yeux et par ses élèves, ce bas-relief où devait se résumer toute l’histoire politique, morale et religieuse de la Germanie, et qui était destiné à orner la frise à l’intérieur de la Walhalla.

Tout se trouvant ainsi préparé, et les travaux se poursuivant partout avec une égale activité sous une direction unique, celle de l’architecte, par l’impulsion d’une volonté suprême, celle du prince, le roi Louis de Bavière posa la première pierre du monument le 18 octobre 1830. Il y eut alors une fête patriotique célébrée au milieu d’un grand concours de peuple, sur cette place encore nue, où il n’existait que le siége d’une grande pensée avec la perspective d’un grand monument. Un ministre, qui était en même temps un poète, et qui, à ce double titre, était digne d’être l’interprète des intentions de son roi, M. de Shenck, fit entendre de nobles paroles du haut de cette éminence de la Walhalla, convertie en parnasse germanique. Douze ans plus tard, à pareil jour, le monument était achevé ; les statues, les bustes, se trouvaient à leur place, et le roi venait lui-même ouvrir solennellement les portes de ce temple, consacré à tous les grands souvenirs de son pays, dont la pensée avait rempli trente-cinq années de sa vie, et dont l’exécution fera la gloire de son règne. Connaissez-vous un seul monument en Europe qui ait une pareille histoire et qui offre un pareil caractère ?

La Walhalla est un temple dorique dans toutes les conditions, dans toute la pureté du style grec. C’est le roi lui-même qui avait arrêté, dans son programme, cette disposition principale, et il avait eu raison ; car l’architecture des Grecs est la seule qui présente ces élémens d’ordre, de régularité, de symétrie et de beauté qui conviennent si bien pour un temple de la Gloire. Toutefois l’architecte était resté libre de déterminer tous les détails d’un temple grec d’après ses propres inspirations ; il pouvait en fixer à son gré les proportions et les rapports, sauf le module des colonnes du péristyle dorique, qui ne devait pas excéder de beaucoup cinq pieds bavarois, et surtout en adapter le style et le goût de décoration à la nature du monument et à sa destination, qui n’avaient rien de commun avec celles des temples