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REVUE. — CHRONIQUE.

pas à nous en plaindre ; nous désirons seulement que les intérêts du commerce français ne se trouvent pas sacrifiés. Nous aussi, nous avons avec le Brésil un traité à renouveler et à améliorer ; nous aussi, et un peu tard à vrai dire, nous envoyons au Brésil un diplomate éclairé, M. le baron de Langsdorff. Nous aimons à croire qu’il a reçu des instructions propres à garantir les intérêts de notre commerce sur le marché brésilien.

On a parlé, ces derniers jours, de réformes importantes qui auraient été faites par le gouvernement pontifical dans la procédure judiciaire et la législation pénale. Nous ne connaissons pas les deux codes dont on parle : nous ne savons s’ils méritent en effet tous les éloges qu’on leur a départis. Tout le monde sait seulement que, dans l’état actuel des esprits, il n’y a pas, même en Italie, de gouvernement qui osât mettre la main à une réforme et afficher ce grand mot, pour faire en réalité tout le contraire et se jouer du public. Aujourd’hui, ce qu’on peut faire, c’est de laisser subsister le mal, de se refuser à tout changement, de soutenir un édifice vermoulu par des expédiens plus ou moins adroits ; mais on n’entreprend pas, de propos délibéré, la réforme d’une législation pour la refaire aussi mauvaise qu’elle était, ou plus mauvaise encore. L’esprit du temps s’y oppose. Il n’y a pas de gouvernement absolu qui ose braver à ce point l’opinion. On peut ne pas accorder toutes les réformes désirables, s’en montrer avare, glisser du clinquant pour de l’or, vouloir se tirer d’affaire à bon marché : tout cela est possible, probable même ; mais toujours est-il que, si on met la main à l’œuvre, on accorde quelque chose, et le pays obtient après tout une amélioration réelle. Nous sommes donc tout disposés à croire que les deux codes romains sont en effet une réforme, réforme qui était du reste on ne peut plus nécessaire.

Au surplus, il est juste de reconnaître que l’esprit de réforme s’est manifesté, plus ou moins, dans tous les états italiens. Tous ont fait ou font des efforts pour améliorer leur législation civile, commerciale, criminelle. Sous ce rapport, l’Italie a repris les allures qu’elle avait avant la révolution de 1789, lorsque l’esprit de réforme se développait dans la Toscane, à Naples, à Milan. Aujourd’hui, sous l’influence des idées françaises, il est plus général encore ; il a pénétré d’un bout de la péninsule à l’autre. Secondé par la vive intelligence du pays et par cette lumière européenne à laquelle les Alpes n’ont jamais opposé et n’opposeront jamais une barrière insurmontable, il assure, en dépit de tout, à la péninsule italique les bienfaits de la civilisation progressive des temps modernes.

Tandis que l’Italie travaille et se développe régulièrement, une fermentation sourde agite les races chrétiennes enclavées dans l’empire ottoman. Tous ces mouvemens partiels, passagers, désordonnés de la Syrie, de la Bulgarie, de la Macédoine, de la Servie, ne sont pas seulement des accidens et des intrigues. C’est notre civilisation, c’est, pour ainsi dire, l’Europe qui veut pénétrer dans ces provinces et les soustraire au joug de la barbarie. C’est une croisade des idées pour la conquête de ces terres saintes. Si habiles que