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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 décembre 1842.


Le gouvernement espagnol se donne en spectacle à l’Europe. Il veut se montrer aussi barbare qu’incapable, et rien ne manque à la représentation. Un pouvoir qui se prétend régulier et qui a toujours à la bouche, dans son langage boursoufflé, les mots de loi, de justice, de constitution, d’humanité, de progrès, a traité une ville espagnole, la ville la plus riche, la plus industrieuse de l’Espagne, comme un général qui se respecte n’ose pas traiter une ville ennemie. Pour mettre à la raison des insurgés, il bombarde Barcelone ! Pendant treize heures, les soldats d’Espartero ont ravagé sans pitié cette ville florissante : rien n’a été respecté, ni les hospices ouverts à la souffrance, ni les édifices publics, ni la maison du consul français. Il fallait à tout prix venger l’invincible duc, dont les Barcelonais avaient troublé le superbe repos et dérangé les combinaisons diplomatiques. Bombarder une ville, l’accabler de projectiles incendiaires, la couvrir de ruines, c’est la vengeance la plus brutale qui puisse être exercée. Mieux vaudrait prendre une ville d’assaut : on peut alors ne frapper que ceux qui résistent ; on n’enveloppe pas nécessairement dans le même désastre les innocens et les coupables, les hommes et les femmes, les vieillards, les enfans, les malades. Si du moins cette violente exécution eût été nécessaire ! Mais la ville ne demandait qu’à capituler. Le parti révolutionnaire était dissous ; les chefs s’étaient embarqués. Le pouvoir était remis en des mains qui, certes, ne songeaient pas à le garder. Un peu de capacité, un peu de dignité, auraient écarté jusqu’à la pensée de cette odieuse catastrophe.

Mais si le bombardement est chose horrible, il n’y a pas de mots pour qualifier les actes qui l’ont suivi. La lecture des bandi soulève le cœur. Quel