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Dans ces appareils admirables, la nature ne permet aucune de ces pertes de force que nos plus habiles ouvriers ne sauraient éviter. Aussi pouvons-nous apprécier le calorique dégagé dans ces réactions chimiques. La chaleur animale tout entière provient uniquement de ce carbone, de cet hydrogène que nous brûlons constamment. L’oxigène nécessaire nous est fourni par l’air, son absorption se fait dans le poumon ; mais c’est dans les derniers ramuscules de nos vaisseaux sanguins que s’accomplit l’acte de la respiration. C’est là qu’a lieu la destruction des principes nourriciers du sang, là que se forment l’eau et l’acide carbonique que nous exhalons sans cesse par la peau et par les poumons.

Pour alimenter ce laboratoire animé, un homme de taille moyenne brûle environ 12 grammes de carbone par heure, ou l’équivalent en hydrogène. Ainsi, nous employons par jour 288 grammes de carbone, et, au bout d’un an, chacun de nous a brûlé par la respiration 105 kilogrammes de la même substance. En supposant que le règne animal tout entier, hommes et animaux compris, puisse être représenté par une population de 4,000 millions d’hommes, on voit que la dépense annuelle du carbone se monte à plus de 400,000 millions de kilogrammes.

« Ainsi, dit M. Dumas, dont nous croyons devoir citer textuellement les expressions, toute la chaleur animale vient de la respiration : elle se mesure par le carbone et l’hydrogène brûlés. Il m’est démontré, en un mot, que l’assimilation poétique de la locomotive du chemin de fer à un animal repose sur des bases plus sérieuses qu’on ne l’a cru peut-être. Dans l’un et l’autre, combustion, chaleur, mouvement ; trois phénomènes liés et proportionnels. » Hâtons-nous d’ajouter avec l’illustre chimiste que l’homme, considéré comme machine empruntant sa force au charbon qu’elle brûle, est encore un appareil bien au-dessus de nos plus parfaites locomotives. Pour monter au sommet du Mont-Blanc, un homme emploie vingt-quatre heures et brûle en moyenne 300 grammes de carbone ; si une machine à vapeur s’était chargée de l’y porter, elle en aurait exigé 1,000 à 1,200. On voit que, même dans cette hypothèse, nos ingénieurs ont encore bien à faire avant de rivaliser avec la nature.

Les végétaux nourris d’eau, d’acide carbonique, d’azote et de produits ammoniacaux ont donc fourni au règne animal les principes immédiats. Celui-ci, avons-nous vu, leur rend à chaque instant de l’eau et de l’acide carbonique. Il est évident qu’il leur doit encore de l’azote et de l’ammoniaque. Le premier s’échappe continuellement