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TENDANCES NOUVELLES DE LA CHIMIE.

chons-le avec soin et soumettons-le à l’analyse ; nous trouverons que, pendant son existence, il a augmenté de poids, et pour cela fixé et retenu de l’hydrogène, de l’oxigène, du carbone, de l’azote et une petite quantité de cendres.

Les élémens de l’atmosphère, voilà donc ce que nous retrouvons surtout dans le végétal. Qu’ils lui soient arrivés directement par l’air qui l’environne ou par celui qui pénètre jusqu’aux racines, qu’ils aient été absorbés à l’état de liberté sous forme gazeuse ou bien en dissolution dans l’eau que le sol reçoit des nuages, ils n’ont pas changé de nature. Pour pénétrer dans ses canaux nourriciers, ils passent d’ordinaire par les racines ; mais cette voie n’est pas la seule qui leur soit ouverte. On sait avec quelle facilité merveilleuse les cactus, les plantes grasses en général, prospèrent dans le terrain le plus stérile. On sait que dans nos serres, et mieux encore sous le soleil brûlant de leur patrie, ces végétaux empruntent à l’air seul tout ce qui est nécessaire à un développement souvent considérable. Pour eux, le sol n’est littéralement qu’un point d’appui. M. Boussingaut vient de prouver qu’il peut en être de même pour nos plantes usuelles, pour celles qui semblent exiger le plus de culture. Il a semé diverses graines dans du sable siliceux pur, préalablement calciné pour détruire toute trace de matière organique susceptible d’agir comme engrais. Ces graines placées à l’abri de la poussière, arrosées avec de l’eau distillée, ont germé et poussé des tiges. Il en est, comme les pois et le treffle, qui ont porté des fleurs et des fruits. L’analyse a démontré que, pendant cette singulière culture, le treffle avait triplé le poids de sa matière première, ce qu’il n’avait pu faire évidemment qu’aux dépens de l’eau et de l’air atmosphérique.

L’eau, soit à l’état de liquide au sein de la terre, soit à l’état de vapeur dans l’atmosphère, fournit abondamment aux végétaux, l’hydrogène et l’oxigène dont ils ont besoin. Mais d’où leur vient cette énorme quantité de carbone qu’ils emploient sans cesse ? Uniquement de l’acide carbonique. Qu’il arrive par les feuilles ou par les racines, c’est toujours à l’état de combinaison avec l’oxigène que le carbone s’introduit dans les végétaux. Ceux-ci semblent l’absorber avec une véritable avidité. M. Boussingaut a dirigé sur des feuilles de vigne enfermées dans un ballon un courant d’air très rapide ; cet air ressortait entièrement dépouillé d’acide carbonique. Que l’on coupe un arbre en pleine sève, et l’on verra, comme M. Boucherie, s’échapper par la portion du tronc qui tient encore à la terre des quantités énormes d’acide carbonique aspiré du sol par les racines.