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PHILOSOPHIE DU DRAME GREC.

Typhon, il est coupé par eux en morceaux comme Osiris ; enfin Minerve, comme une autre Isis, porte ses membres à Jupiter, qui les réunit et le ressuscite après trois jours passés aux enfers.

Les Éleusinies, qu’on appelait les mystères par excellence, et dont la célébration faisait accourir des pèlerins de tous les pays, avaient pour argument l’histoire de Cérès et de Perséphone ou Proserpine. Les trois élémens de cette histoire sont : en premier lieu, les joies innocentes de la jeune fille jouant avec les fleurs dans les campagnes de la Sicile, ensuite son enlèvement par Pluton, et les douleurs de sa mère qui parcourt le monde, comme Isis, en cherchant l’objet de sa tendresse ; en troisième lieu, le bonheur de Proserpine retrouvée, et son retour à la lumière des vivans.

Les mystères des Cabires en Samothrace, non moins célèbres et probablement plus anciens, ne différaient des précédens que par les noms et les particularités cérémonielles. Axieros était Cérès, Axiochersos était Pluton, Axiochersa était Proserpine. Le quatrième personnage, Casmilus, ne représentait que le prêtre, ou peut-être était la personnification de la classe sacerdotale ; aussi traduisait-on son nom par celui d’Hermès ou du Toth égyptien. Ces mystères cabiriques semblent, à cause de leur antiquité et de leurs formes grossières, être arrivés directement d’Égypte ; et s’être ensuite répandus en Thrace et dans la Grèce méridionale sous les noms de Déméter et de Dionysus.

Les fêtes phéniciennes de Thâmmouz, Adonaï ou Adonis, sont l’expression d’une aventure toute pareille dans son essence : Adonis, élevé par les nymphes d’Arabie, se retire vers le Liban, et y jouit d’une période de bonheur avec la déesse Vénus ; tué ensuite par un sanglier, Vénus veut l’arracher à la mort, comme Isis ou Cérès, et fatigue les dieux de ses prières ; enfin Adonis lui est rendu, et revient sur la terre. On sait avec quelles démonstrations de douleur la mort d’Adonis était célébrée à Athènes ; les femmes consacraient un jour entier à un deuil exagéré ; elles se frappaient la poitrine, se rasaient la tête, se lamentaient dans les rues, et imitaient l’appareil des funérailles, en promenant par la ville des figures qui représentaient un cadavre. Lucien compare leurs cris de douleur à ceux des Égyptiens pleurant le bœuf Apis. Un autre jour, on chantait la résurrection d’Adonis ; alors c’était une joie universelle, comme celle des Égyptiens lorsqu’Osiris était retrouvé.

Les mystères phrygiens célébraient Attis. Attis, heureux d’abord comme Adonis, de son union avec une déesse, périt bientôt d’une