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ou quatre ans, deux cent mille électeurs sont convoqués ; toutes les questions sont portées devant eux, et, par le choix de leurs mandataires, il dépend d’eux en partie de résoudre ces questions à leur gré. Sans doute, une fois élue, la chambre a son esprit et son indépendance ; elle devient souveraine à son tour et pour plus de temps. Mais, de son côté, le corps électoral, qui intervient souvent et d’une manière directe dans les affaires, arrive successivement à prendre une sorte de personnalité politique dont la prépondérance se fera de plus en plus sentir. À ces électeurs qui, depuis vingt-cinq ans, ont été consultés, invoqués dans toutes les crises, dans tous les périls qu’a traversés la société, il faut parler non pas le langage d’une démagogie grossière, mais celui de la raison et des véritables intérêts du pays.

La France veut la monarchie représentative. S’il est un point qui doive être hors de tout débat désormais, c’est à coup sûr celui-là. Rêver pour le pays une autre forme de gouvernement, après cinquante années d’essais et de convulsions, ne peut plus être que le fait d’une ignorance ou d’une folie également incurable. Cette monarchie représentative, déjà constituée par la charte de 1814 ; a reçu une consécration éclatante par la charte de 1830. L’institution fondamentale de la royauté s’est affermie même au milieu des orages, parce qu’une tige nouvelle a été mise à la place d’un tronc desséché. La liberté constitutionnelle a été assise sur de plus larges bases. Jamais pacte politique n’a été plus clair, plus loyal, plus satisfaisant, que celui de 1830. Depuis cette grande époque, des lois scrupuleusement élaborées par les trois pouvoirs ont organisé les franchises municipales et la représentation des intérêts départementaux. Aujourd’hui qu’avons-nous à faire ? Nous avons à consolider en améliorant. Le travail d’amélioration est la conséquence naturelle du génie conservateur ; car, en politique comme dans la nature, rien ne se conserve sans développer et accroître ses forces.

Nous croyons fermement que cette pensée, consolider en améliorant, anime aujourd’hui la France, et nous souhaitons que ce soit elle qui inspire surtout le corps électoral dans les choix qu’il va faire. Il est permis de l’espérer ; on ne remarque même pas dans le pays les agitations qu’amène souvent une élection générale. Les partis ne s’accablent pas mutuellement, comme en 1839, d’écrits, de circulaires et de pamphlets. On compte les brochures que la circonstance a fait naître. Cette extrême sobriété dans la polémique est un symptôme. Bien des passions sont éteintes ; que d’illusions évanouies ! En 1834, en