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LES ÉCOLIERS DE VANNES.

III.

Mais un souffle joyeux court sur les métairies :
Le foin remplit les cours, dans les grasses prairies
Les rires des faneurs partout sont entendus,
Et je vois les fusils aux foyers suspendus.


« Pour un jour de travail comme vous voilà belle !
« Votre galant du bourg, voisine, vous appelle ?
« — Non, railleur ! non, méchant ! à Vannes je m’en vais
« Ouïr une grand’messe en l’honneur de la paix.
« Les prêtres ont dressé l’autel sur la garenne,
« Et mon brave filleul, s’il faut qu’on vous l’apprenne,
« Celui qui s’est battu pour vous durant trois mois,
« De la main de son chef doit recevoir la croix.
« — Oh ! Dieu veille sur lui ! c’est un brave dans l’ame.
« Moi, je vais à mon pré. Gloire à vous, noble femme ! »


Quelle foule ! soldats, ouvriers et marchands,
Les hommes de la mer et les hommes des champs,
Et leurs filles aussi, sous les coiffes de neige,
Brillant comme des fleurs au milieu du cortége,
Fleurs de Loc-Maria, de Lî-mûr, de Ban-gor ;
Tous les prêtres enfin avec leurs chappes d’or.
Mais, silence ! le diacre, à la main son calice,
Vient suivi de l’évêque et prépare l’office. —
Vous, pieux assistans, à genoux ! à genoux !
Et priez pour les morts qui prîront Dieu pour vous.
Surtout, pontifes saints, point d’hymnes de victoire,
Mais dites en pleurant la messe expiatoire
De ces fureurs de sang par qui sont envahis
Les fils d’un même père et d’un même pays.
Puis ces jeunes vainqueurs, purifiés et calmes,
Aux marches de l’autel iront cueillir leurs palmes.