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PUITS ARTÉSIENS.

travaux du forage, l’Institut, et avec lui le monde savant tout entier, n’ont vu dans ce travail qu’une grande et belle expérience de physique, noblement entreprise par le plus riche, par le plus libéral, par le plus éclairé des conseils municipaux de la France.

À présent que les eaux ont jailli, on déclare hautement au secrétariat de l’Institut et à l’Observatoire, comme à l’Hôtel-de-Ville, que le forage de Grenelle a été considéré dès l’origine comme un travail éminemment hydraulique, et que l’utilité dont il pouvait être pour les progrès de la physique n’a jamais eu qu’une importance secondaire. Du reste, on se glorifie également des solutions de l’un ou de l’autre problème, administratif ou scientifique ; on annonce que la première sera bientôt complète ; on affirme, comme un fait au-dessus de toute contestation, que la seconde ne laisse dès à présent rien à désirer ; on ajoute enfin que toutes les mesures qui ont été prises sont conformes aux plus sages, aux plus sévères prescriptions de la science et de l’art ; en un mot, on se donne un bill complet d’indemnité. Pour nous, oubliant cette question du caractère primitif du forage de Grenelle, question que nous n’avons effleurée que par un scrupule d’historien, examinons l’entreprise dans son état présent, et voyons si les deux problèmes ont été résolus aussi bien qu’on le dit au public.

Pour mettre le lecteur à même de bien comprendre cette grande opération, il nous faut d’abord examiner le vaste bassin géologique dont Paris est comme le centre, et qui comprend une grande partie de la France.

Concevez une série de couches de terre, courbées en forme de soucoupes, c’est-à-dire plus épaisses au centre que sur les bords et légèrement concaves, emboîtées les unes dans les autres par ordre de grandeur ; tournez leur concavité vers le ciel ; logez enfin dans le creux de la couche supérieure une masse qui s’y moule et présente au ciel une surface irrégulière, là concave, ici convexe ; donnez à cet ensemble une largeur mille fois plus grande environ que son épaisseur centrale, et vous aurez une grossière image de la masse des terrains qui composent le bassin géologique de Paris. Afin d’avoir une idée plus exacte de l’ensemble de terrains qu’a traversés le sondage de Grenelle, il faut faire une large échancrure à cette masse sur une portion de ses bords, puis, au lieu de donner à chaque coupe une forme arrondie, pétrir l’ensemble de manière à rendre les contours irréguliers, et donner aux bords de chacune d’elles une grande épaisseur, du reste très inégale.