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REVUE DES DEUX MONDES.

De choisir quelque plaisir,
Qu’elle ne nous soit ravie.

Nous semblons à l’arbre verd
Qui demeure un temps couvert
De mainte feuille naïve,
Puis, dès que l’hiver arrive,
Toutes ses feuilles il perd.

Ce pendant que la jeunesse
Nous répand de sa richesse,
Toujours gais nous florissons ;
Mais soudain nous flétrissons
Assaillis de la vieillesse.

Car ce vieil faucheur, ce Tems,
Qui dévore ses enfans,
Ayant ailé nos années,
Les fait voler empennées
Plus tôt que les mêmes vents[1].

Doncques tandis que nous sommes,
Mon Castin, entre les hommes,
N’ayons que notre aise cher,
Sans aller là-haut chercher
Tant de feux et tant d’atomes.

Quelque fois il faut mourir,
Et, si quelqu’un peut guérir
Quelque fois de quelque peine,
Enfin son attente vaine
Ne sait plus où recourir.

L’espérance est trop mauvaise.
Allons doncques sous la braise
Cacher ces marrons si beaux,
Et de ces bons vins nouveaux
Appaisons notre mésaise

Aisant ainsi notre cœur,
Le petit Archer vainqueur
Nous viendra dans la mémoire ;
Car, sans le manger et boire,
Son trait n’a point de vigueur.

Puis avecq’ nos nymphes gayes

  1. Plus vite que les vents mêmes.