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LA MONARCHIE AUTRICHIENNE.

table bataille de Crécy. Ce magnifique palais, l’antique Hradschin, qui se déploie au sommet de la colline, dominant la ville et la riante vallée de la Moldau, a été l’asile et la cour de Charles X. Là, pauvrement reléguée au deuxième étage et réduite à s’éloigner quand l’empereur d’Autriche venait visiter cette capitale, la branche aînée a tristement végété, entourée de la respectueuse pitié qu’excitent d’aussi grandes infortunes chez les populations disposées à vénérer les oints du Seigneur, mais escortée aussi des misérables intrigues qui avaient tant contribué à la précipiter de toute la hauteur d’une légitimité de huit siècles. Vous sortez de ce palais, saisi de l’abaissement où, par leurs fautes et pour l’exemple de tous les souverains, ont été réduits les fils et les héritiers de Hugues Capet, de saint Louis, d’Henri IV, et vous entrez dans l’église métropolitaine de Saint-Guy. Vous y apercevez, dans un coin, un autel modeste restauré par la duchesse d’Angoulême, ainsi que le consacre une inscription latine. Sortez de la cathédrale et continuez à gravir la colline, vous rencontrez le Strahow, couvent des Prémontrés. Pendant que vous en admirerez la bibliothèque, que vantent les habitans de Prague, le frère bibliothécaire vous fera remarquer, au milieu de l’une des salles, un autre souvenir d’une autre dynastie jetée à bas de ce beau trône de France : ce sont les livres offerts par l’impératrice Marie-Louise, la fille des antiques Césars de l’Allemagne, l’épouse du puissant César des Gaules à qui l’on appliquait le mot de la Bible sur un autre conquérant : « La terre se tut devant lui. » Singulier hasard ! l’une des pièces principales de ce cadeau de l’archiduchesse Marie-Louise, c’est la collection des Liliacées de Redouté ; ce sont les lis qui devaient bientôt remplacer les aigles, les lis, emblème de la dynastie qui devait lui ravir à elle-même la couronne. Mais au moins Marie-Louise a été traitée comme la fille de la maison. Sur le casier qui abrite ses livres elle reste l’impératrice des Français ; et la duchesse d’Angoulême, sur l’autel réparé par ses soins, n’a point de nom qui lui soit propre, point de titre pour son époux. Elle est qualifiée seulement de Marie-Thérèse, fille de Louis XVI ; soit que la princesse, en relevant cet autel, ait uniquement voulu le consacrer à la mémoire de son père, et se faire une place où elle pût venir verser ses intarissables larmes, soit que le gouvernement autrichien, circonspect envers la révolution de juillet et la dynastie nouvelle, n’ait point permis qu’un de ses temples offrît aux regards une inscription plus conforme aux prétentions de la famille déchue ou même à ses regrets.

La Bohême a encore d’autres liens avec la royauté française. Par