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quatre ou cinq têtes, et si nous admettons, ce qui est généralement reconnu, que les chefs de famille paient à peu près seuls l’impôt, on verra combien peu de familles resteront en dehors de la propriété foncière ; il y en aura tout au plus une sur cinq. Ce fait extraordinaire suffirait, à défaut de tout autre, pour donner une idée du bouleversement total qui s’est opéré dans la société napolitaine. La propriété y a passé en quelque sorte, en quarante ans, d’une extrémité à l’autre. En France, le nombre des cotes foncières est égal au tiers du chiffre total de la population ; dans le royaume de Naples, il est d’un peu moins du quart. On voit que la différence n’est pas grande. Cette différence disparaît même tout-à-fait quand on songe qu’il y a encore dans le royaume de vastes espaces qui appartiennent au domaine, et que les cotes ne portent que sur le reste.

Il suffit de parcourir l’almanach royal, publié tous les ans dans la forme du nôtre par l’imprimerie royale napolitaine, pour voir combien l’organisation du pays est semblable à celle de la France, moins la liberté. Le conseil d’état ou conseil privé est le premier corps politique ; il est présidé par le roi, ou, en son absence, par le président du conseil. Les affaires se préparent seulement dans le conseil des ministres, et se décident dans le conseil privé, excepté les questions extérieures, qui se traitent directement entre le ministre spécial et le roi. Cette combinaison a été imaginée pour donner à chaque affaire au moins l’apparence d’un double degré d’instruction ; elle remplace tout le mécanisme compliqué de notre système politique. Les ministères sont au nombre de huit : la présidence du conseil, les affaires extérieures, la justice, les affaires ecclésiastiques, les finances, l’intérieur, la guerre et la marine en un seul département, et la police générale. Tous ces ministères sont réunis, depuis 1825, en un seul hôtel, vaste édifice qui sert en même temps de Bourse, et qui a deux entrées sur les deux points les plus fréquentés de la ville, la rue de Tolède et la place du Château. Les attributions des différens ministres sont à peu près les mêmes que chez nous, excepté pour la présidence du conseil, qui a des attributions spéciales, comme la garde du sceau royal, la direction de l’imprimerie royale, le dépôt des lois et décrets, etc.

Du reste, les bureaux des ministères sont organisés comme à Paris, et la centralisation est peut-être poussée encore plus loin qu’en France. Ce qu’on appelle la Consulta générale n’est autre chose que notre conseil d’état ; elle est partagée en comités qui correspondent aux divers ministères, et présidée par un membre du con-