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jamais été le théâtre. Nous voulons parler du mouvement dont l’université d’Oxford est le centre.

L’église épiscopale d’Angleterre est désormais séparée en deux branches, la branche protestante et la branche catholique et apostolique ; la première, qui ne fait remonter son origine que jusqu’à la réformation, la seconde, qui prétend descendre directement et immédiatement de Jésus-Christ et des apôtres, sans que la ligne de la tradition ait été interrompue par la réformation ; l’une qui emprunte sa légitimité à un acte de la législature, l’autre qui fait découler la sienne de l’institution divine. Cette seconde église n’est protestante qu’en ce qu’elle nie la primauté du pape ; mais elle substitue à l’unité romaine l’unité apostolique. À ses yeux, c’est l’église d’Angleterre qui a conservé le dépôt de la tradition, c’est elle qui est la véritable église catholique, et c’est l’église romaine qui se sépare de la communion catholique en restant volontairement éloignée de l’église d’Angleterre.

Cette église a pour doctrine fondamentale l’abjuration du principe protestant, c’est-à-dire du principe de négation. Elle sent que vouloir fonder quelque chose sur une pareille base, c’est bâtir sur des sables mouvans ; qu’il est impossible d’édifier une religion sur le dogme de l’infaillibilité individuelle, et une société sur le principe d’insurrection permanente contre l’autorité. C’est pourquoi, au milieu de l’ébranlement du monde, elle cherche un appui dans l’affirmation et la tradition. Les plus grands esprits, les cœurs les plus élevés, les plus illustres caractères de la Grande-Bretagne, sont engagés dans cette œuvre de reconstruction. Des millions de regards, dans la chrétienté, sont silencieusement fixés sur Oxford. Là est le travail, la vie, l’action ; là est le foyer, et, pour ainsi dire, le cœur théologique du monde dont les battemens ardens vont faire vibrer les échos de tous les cœurs que tourmentent les questions religieuses.

Eh bien ! c’est le moment où tant d’hommes d’élite font de si admirables efforts pour purger leur église de son venin originel, c’est ce moment même que cette église choisit pour consommer, à la face du monde, l’adultère protestant ! L’école nouvelle a poussé un cri d’alarme ; elle rejette avec effroi loin d’elle la contamination du principe destructeur, et si le roi de Prusse va, comme on l’a dit, visiter Oxford, il y rencontrera plus d’un sombre visage et plus d’un œil irrité.

Ce n’est pas seulement parce qu’un prince protestant y participait que l’école d’Oxford a vu avec ombrage la création d’un évêché à Jérusalem, c’est aussi parce que cet établissement était à ses yeux un empiètement sur des droits qu’elle considère comme sacrés. Ayant pour but, comme nous l’avons dit, de substituer l’unité apostolique à l’unité romaine, elle travaille à relier entre elles les diverses églises qui ont conservé traditionnellement le dépôt de l’épiscopat. À ce titre, l’église grecque est pour elle une alliée, une sœur dont elle se trouve temporairement séparée, mais qu’elle espère ramener un jour dans le sein de la commune famille. On peut même ajouter que les églises