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FRANÇOUNETTO.

(saounéja) sous les arbres qui l’ont vu naître. Il ne sait d’ailleurs chanter ni de galans chevaliers,

Ni de grandos damos d’aounou,
Que parlon commo un libre, nou ;
May simple, de la pastourelo
Canti l’amou tendre, que play
Aoutan qu’amou de doumayzelo ;
Car n’ès pas, coumo dit ma may,
La qui parlo millou que sat ayma lou may.


Ni de grandes dames d’honneur,
Qui parlent comme un livre, non ;
Plus simple, de la pastourelle
Je chante l’amour tendre qui plaît
Autant qu’amour de demoiselle ;
Car ce n’est pas, comme dit ma mère,
Celle qui parle le mieux qui sait aimer le plus.

Si le lecteur et moi nous n’avons pas complètement perdu notre temps, moi en écrivant et lui en parcourant les observations qui précèdent sur la prosodie du patois, il ne doit pas être tout-à-fait insensible à l’harmonie délicieuse de ces deux vers :

Car n’ès pas, coumo dit ma may,
La qui parlo millou que sat ayma leu may
.

La fin de la pièce est encore plus touchante, s’il est possible ; pour bien chanter la pauvreté joyeuse, dit le poète, il faut être pauvre et joyeux :

Damori doun jouyous è paoure
Dambé moun pa de segle è l’aygo de ma foun ;
On badailla dins un saloun,
On rits debats de feillos d’aoure ;
E jou risi de tout ; res plus bèn m’atrista,
Ey plourat trop lountèn ; boli me resquita.


Je demeure donc joyeux et pauvre
Avec mon pain de seigle et l’eau de ma fontaine ;
On bâille dans un salon,
On rit sous des feuilles d’arbre ;
Et moi, je ris de tout ; rien ne vient plus m’attrister ;
J’ai pleuré trop long-temps ; je veux me racquitter.

Connaissez-vous un vers plus charmant que celui-ci, qui résume