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va de la mer Caspienne à la Chine. Au nord, elle touche par tous ses points à la Sibérie ; au sud, elle est terminée par une ligne brisée qui, partant du nord de la mer Caspienne, va rejoindre les fortifications chinoises après avoir côtoyé le pays des Turkomans, le khannat de Khiva, les monts Ghaour, la Boukharie et le Turkhestan. La région occidentale de la steppe des Kirghiz-Kazaks, comprise entre l’embouchure de l’Emba dans la mer Caspienne et les sources de la rivière de la Tobol, est entièrement occupée par de hautes montagnes dont les plus remarquables ne paraissent être que des ramifications des Ourals. Cette longue chaîne, qui forme une des barrières de l’empire russe, se prolonge dans la steppe sur deux points différens. La première de ces branches, qui domine le cours du fleuve Oural, entre les forteresses d’Orsk et de Gouberlinsk, porte le nom de monts Gouberlines sur le territoire moscovite ; sur la rive opposée, elle reçoit le nom de Tachkitchou. Quelques géographes regardent même cette branche comme la véritable chaîne de l’Oural et repoussent jusque-là les limites naturelles de l’Europe. Quoi qu’il en soit, c’est de ce point que semblent sortir toutes les arêtes de montagnes qui couvrent cette partie de la steppe. Nous mentionnerons particulièrement les monts Mougodjar, qui, par leur élévation, leur aspect sauvage et les richesses de leurs entrailles, méritent à bien des titres toute l’attention des naturalistes. La deuxième branche de l’Oural s’étend entre le fleuve de ce nom et la rivière de l’Ouïl, et finit par se réunir aux monts Mougodjar. Les mines nombreuses et variées que toutes ces roches recèlent dans leur sein n’ont pas encore été fouillées par l’industrie humaine. « Les Kirghiz, dit M. de Levchine, semblables aux griffons d’Hérodote, sont les gardiens de ces trésors au profit de la postérité ou d’une nation civilisée qui saura les produire à la lumière. » Déjà des officiers et quelques voyageurs russes et allemands, hommes patiens, énergiques et dévoués à la science, MM. Pander, Ewersman, Changhine, Meyendorff, etc., ont été interroger la nature dans ces lieux où elle est demeurée souveraine, et leurs belles investigations ne seront point perdues pour l’avenir.

C’est à l’ouest et au nord que se trouvent les plus vastes forêts, dont l’importance n’est pas, au surplus, en rapport avec l’étendue de la steppe. Dans leur voisinage, et dans quelques fraîches vallées des Mougodjar, on admire une fertilité bien rare sur un sol en général sablonneux et chargé de matières salines et nitreuses, en quantité tellement énorme, que l’hypothèse d’un déluge local et d’une date assez récente est admise par plusieurs savans. Les cimes des mon-