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HISTOIRE DIPLOMATIQUE DE LA QUESTION D’ORIENT.

testables. Elle a daigné ordonner que Méhémet-Ali-Pacha soit destitué de son poste de gouverneur d’Égypte, et, comme préliminaire des hostilités, il a été décidé de soumettre tous les ports et échelles d’Égypte et de la Syrie à un blocus très rigoureux. »

La Porte, en déposant Méhémet-Ali, prenait une mesure fort grave, que le traité du 15 juillet n’avait pas prévue, et qui excédait certainement tous les actes hostiles décrits et définis par ce traité. Le conseil était venu de lord Ponsonby, qui essaie, dans la dépêche suivante, d’en déguiser l’origine. Mais on comprend sans peine, à la manière dont il le défend, qu’il a pour cet excès de pouvoir un faible d’auteur.

« Nedim (secrétaire de Reschid) m’a dit que Reschid-Pacha avait l’intention de déposer le pacha. Je l’ai prié d’assurer au reiss-effendi que je considérais cette mesure non-seulement comme utile, mais comme nécessaire, et que j’étais en correspondance avec mes collègues à ce sujet.

« Hier au soir, j’eus une longue conversation avec l’internonce, et, après avoir examiné la question avec moi, son excellence parut partager mon opinion sur la nécessité de dépouiller Méhémet-Ali du rang qu’il occupe comme pacha d’Égypte. »

Lord Ponsonby s’étudie ensuite à démontrer que la déposition de Méhémet-Ali peut seule donner une couleur de légalité aux mesures coercitives que l’on dirigera contre lui, et que l’importance que l’on attache en Turquie à un acte aussi solennel émané du sultan sera d’un effet décisif dans la lutte qui va s’ouvrir. Puis il ajoute :

« Le seul doute que j’aie entendu émettre relativement à la convenance de déposer Méhémet-Ali est fondé sur les dernières lignes de la section VII de l’acte séparé, où il est dit : « Si Méhémet-Ali n’accepte pas l’hérédité de l’Égypte, le sultan se considérera comme libre de retirer son offre et de suivre telle marche ultérieure que ses propres intérêts et les conseils de ses alliés pourront lui suggérer. »

« Quelques personnes pensent que, par cette dernière phrase, le sultan s’oblige à n’agir qu’après avoir obtenu l’approbation de ses alliés. Pour moi, il me paraît qu’une telle interprétation équivaudrait à refuser au sultan tout droit d’agir en quoi que ce soit et de quelque manière que ce soit, excepté après avoir pris l’avis de ses alliés sur chaque cas particulier. Est-il raisonnable de penser qu’une convention faite expressément pour maintenir l’autorité légale du sultan contienne un article qui ait pour effet d’enlever au sultan l’exercice d’un des attributs les plus importans de la souveraineté ? » (Dépêche du 10 septembre.)

Lord Ponsonby a beau se débattre contre le texte qui le condamne. Il ne s’agit pas de savoir si la convention du 15 juillet a été logique