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DE LA POLITIQUE DE LA FRANCE EN ITALIE.

que l’intervention de la France dans l’affaire des soufres de Sicile, lors des différends qui ont éclaté avec l’Angleterre, les a remis sur le pied dont ils n’auraient jamais dû s’écarter. Pourquoi ne pas espérer que le jeune monarque aura reconnu et sentira long-temps le prix d’un service rendu sans ostentation, accepté sans faiblesse, et qui était de nature à honorer les deux nations ? Ceux qui nous étaient contraires et qui avaient mis ailleurs leur confiance auront pu voir où étaient les alliés utiles, et si les secours efficaces n’arrivaient pas plus vite de Toulon que des frontières de la Lombardie.

Je n’ai point l’intention de m’occuper des diverses provinces de l’Italie qui sont, comme la Lombardie, soumises depuis long-temps à la domination autrichienne, ou, comme Venise, plus récemment réunies. Je n’ai rien à dire non plus du grand-duché de Toscane, ce tranquille héritage des princes les plus populaires. Pourquoi parlerais-je des états de Parme et de Plaisance, qui doivent retourner au duc de Lucques ? du petit empire actuel de ce dernier, qui doit être réuni à la Toscane, et du territoire qui reconnaît la domination du duc de Modène ? Ces derniers états ont trop peu d’importance. Je considère les autres comme acquis à l’Autriche ou comme nécessairement placés sous sa dépendance. Ce n’est que sur les états véritablement indépendans et neutres que je voudrais voir se porter l’action de la France. Pour qu’elle pût s’étendre ailleurs, il faudrait des bouleversemens et des révolutions ; je ne les prévois point, quant au présent ; je laisse à d’autres de les souhaiter. La politique que j’indique est une politique qui accepte avec regret, mais enfin qui accepte partout, en Italie comme ailleurs, l’état actuel de l’Europe, et qui croit que la paix honorablement maintenue, honnêtement entendue, habilement mise à profit, doit nous être aussi glorieuse et plus avantageuse que la guerre ; peut-être cette opinion ne plaira-t-elle point à tout le monde. Il y a une fraction du parti conservateur, et des feuilles publiques lui servent d’organe, qui est aussi hardie dans ses projets et ses lointaines espérances qu’elle est timorée et pacifique dans les affaires du moment. J’ai entendu développer des thèses de ce genre à propos de l’Italie. La question d’Orient, qui renfermait tant de grandes choses avant qu’elle fût réduite à l’état où nous la voyons aujourd’hui, renfermait aussi le secret des destins de l’Italie. L’empire ottoman devait être partagé. L’Autriche aurait reçu, bon gré, mal gré, les districts du nord de la Turquie en échange de la Lombardie et de Venise ; on l’aurait fait ce qui s’appelle refluer vers l’Orient. Un grand empire, composé de toute l’Italie