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simulation, quelquefois avec sévérité. On voit bien vite que ceux mêmes qui se croient mécontens n’ont pas de griefs bien amers contre leur gouvernement, qu’ils le sentent national, et qu’ils n’en désespèrent pas. On pourrait se croire dans un pays libre au milieu des entretiens des salons de l’aristocratie napolitaine ; quoiqu’inoffensive, cette aristocratie a l’idée d’être une puissance avec laquelle il faut un peu compter ; le roi a des attentions pour elle ; cela lui plaît, et cela lui suffit. Quelques-uns de ses membres les plus distingués occupent des places dans l’armée, dans la diplomatie, dans l’administration, et y apportent de véritables lumières. Mais c’est surtout dans la classe moyenne et dans les familles qui s’étaient attachées aux princes de la dynastie impériale que s’est entretenu le mouvement de l’intelligence et le goût du progrès ; cette partie de la nation n’a point d’hostilité contre l’état de choses actuel ; préoccupée surtout de l’avenir, elle cherche à l’entrevoir et à le préparer. C’est là que les moindres démarches du roi, tous les actes de son gouvernement, sont étudiés et commentés avec un intérêt de tous les jours. On se félicite du bien en l’exagérant quelque peu, on s’afflige du mal en l’atténuant autant que possible. On se communique ses doutes, ses craintes, ses raisons de confiance. Il semble que l’esprit libéral et fidèle qui animait une partie notable de la France sous la restauration ait passé à Naples. C’est la même position, ce sont les mêmes sentimens que le succès n’a point calmés ; la même flamme qui brûlait alors chez nous et qui s’est éteinte après le triomphe, jette encore chez eux d’éparses, mais de vives lumières. Est-il besoin d’ajouter que c’est toujours de notre côté, vers l’action bienfaisante de la France, que sont tournés tant de patriotiques vœux et d’honnêtes espérances ? Il y a presque unanimité. Noblesse, bourgeoisie et peuple s’attendent à un avenir meilleur, et croient que nous n’y serons pas tout-à-fait étrangers.

J’en ai dit assez pour faire pressentir le rôle que le gouvernement français pouvait jouer à Naples au milieu de circonstances et de dispositions aussi favorables. La révolution de juillet nous a privés de quelques alliances de parenté ; l’ascendant du chef aîné de la maison de Bourbon ne peut plus s’exercer à notre profit. Naples et la France ne sauraient oublier toutefois qu’une princesse auguste, notre reine, unit encore les deux familles. Ses vertus, qui échappent à l’éloge par le respect qu’elles inspirent, sont aussi un lien entre les deux pays.

Nos premiers rapports avec Naples n’ont pas été heureux. On dit