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la plus sérieuse attention, sans trouble et sans colère, s’ils étaient en mesure de se défendre contre un ennemi qui avait déjà pénétré jusqu’au milieu de leur pays, et d’entreprendre, dans ce cas, une résistance désespérée. Mais il les engagea, s’ils ne croyaient pas le pouvoir, à continuer la négociation en décidant, ou d’y comprendre les trois provinces envahies, ou de la réduire aux quatre provinces qui ne l’étaient pas encore, ou enfin de traiter pour la Hollande seule qui, séparée des autres, obtiendrait plus aisément de meilleures conditions. Il parut incliner à ne pas rompre la négociation. Mais cette fois l’indignation ranima les courages, et, méprisant les conseils d’une honteuse prudence, on aima mieux périr en se défendant qu’en se soumettant. Toutefois, quelques villes opinèrent encore pour les résolutions pusillanimes. De ce nombre furent Leyde, Dordrecht, Delft et Hoorn. Elles dirent qu’il n’y avait aucun espoir d’arracher à l’ennemi ce qu’il avait conquis, et de conserver contre lui ce qui restait à la république ; qu’on ne pouvait se maintenir dans aucune des cinq positions occupées par les faibles troupes des Provinces-Unies ; qu’il suffisait à l’armée française d’en forcer une seule pour que toute la Hollande méridionale fût perdue ; qu’il fallait donc négocier, et, à la rigueur, traiter uniquement pour la Hollande, si l’on ne voulait pas bientôt demeurer sans patrie.

Cet avis que la faiblesse dont il devait pénétrer les ames rendait au fond moins prudent qu’une résolution téméraire, mais capable, en étant généreuse, d’exalter les courages jusqu’à l’héroïsme, fut combattu par ceux même qui avaient naguère conseillé l’accommodement. Les députés de la noblesse déclarèrent qu’on ne saurait accepter des conditions aussi dures et aussi déshonorantes ; qu’à traiter, il ne fallait céder que Maëstricht et Clèves, et comprendre les sept provinces dans la négociation. Haarlem, qui avait été très animée pour la négociation, opina pour la rupture. Enfin M. Hop, pensionnaire d’Amsterdam, représenta que cette négociation avait été entamée sans le consentement des autres provinces, malgré la protestation de la Zélande, et contre l’avis de la principale ville de Hollande ; qu’elle mécontentait leurs alliés les Espagnols, qu’elle empêchait les princes de l’Europe alarmés de la grandeur excessive de la France, et disposés dès-lors à ne pas souffrir qu’elle se rendît maîtresse des Provinces-Unies, de marcher à leur secours ; qu’on ne devait pas s’effrayer des conquêtes de Louis XIV, qui en était déjà embarrassé parce qu’il fallait y mettre de fortes garnisons, et qui dès-lors n’avait plus les moyens d’en faire beaucoup de nouvelles. Il conclut qu’il fallait