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REVUE. — CHRONIQUE.

courir et que rien ne remplace, ce qui est la vie même des écoles, c’est leur amélioration religieuse et morale, leur bonne discipline et la saine instruction qu’on y reçoit. » Sur 29,000 écoles de garçons, il y en avait, en 1837, 10,000 qui étaient désignées par les inspecteurs comme ayant une bonne direction ; aujourd’hui le nombre des écoles bien dirigées est de 11,500.

Le nombre des classes d’adultes, depuis 1837, a presque doublé. Il y a 1,600 de ces classes qui ne laissent rien à désirer sous le rapport de la direction et des résultats. « Il est consolant de penser que 68,500 citoyens pauvres qui ont été privés du bienfait de l’instruction primaire, et qui sont obligés, pour vivre, de se livrer à de rudes travaux, trouvent cependant le temps de réparer, par de tardives et difficiles études, l’abandon où leur jeunesse a été laissée. »

En 1837, 261 salles d’asile recevaient ensemble 29,214 enfans : maintenant 555 salles d’asile reçoivent ensemble 51,000 enfans. C’est quelque chose, mais c’est encore bien peu. « Ce n’est pas sans un vif regret (et l’on doit remercier M. Villemain de ces belles paroles) qu’il me faut avouer que, malgré de récens et heureux efforts, une création si utile, si chrétienne, est encore si peu répandue, comparativement à la grandeur des besoins… Combien de villes, combien de centres de population manufacturière et agricole où cette institution manque encore, et où elle serait facilement praticable !… Multiplier les salles d’asile, c’est servir le pays autant que l’humanité, c’est diminuer les chances prématurées de vagabondage et de vice, c’est préparer à la patrie le trésor inépuisable d’une jeunesse plus saine, plus morale, plus vigoureuse pour la paix et pour la guerre. »

Nous regrettons que le temps et l’espace nous manquent pour faire connaître à nos lecteurs avec plus de détail encore le travail de M. Villemain ; pour ne pas le dénaturer, il faudrait le transcrire en entier : il n’y a pas un mot inutile, il n’y a pas un renseignement qui ne soit précieux pour les hommes qui sont pénétrés comme nous de la haute importance du sujet.

Ainsi, encore une fois, nous sommes loin de méconnaître ce que la révolution de juillet a fait pour l’instruction nationale. Ce grand progrès est une de ses gloires. Cependant, et nous en appelons au témoignage éclairé de M. le ministre, il reste encore beaucoup à faire, non-seulement pour étendre le bienfait de l’instruction à toutes les communes françaises, mais plus encore pour que cette instruction soit partout forte et bien dirigée.

M. le ministre indique des améliorations et des moyens sur lesquels nous nous proposons de revenir pour les examiner avec tout le soin et la maturité qu’il faut apporter dans ces délicates et importantes matières. En attendant, nous l’adjurons de ne pas laisser passer la session sans porter aux chambres toutes les demandes que son zèle éclairé lui suggère pour hâter le progrès de l’instruction primaire. Qu’il ose, et les chambres, nous en sommes convaincus, applaudiront à son courage, et lui accorderont tous les moyens nécessaires. Pourquoi retarder un si grand bienfait ? Pourquoi, on peut le dire, compromettre l’avenir du pays par des lenteurs ou par de tristes économies ?