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LE PARATONNERRE.

L’enfant est de votre avis et du mien, il trouve Mme Baretty fort agréable. À la première occasion je le lance. Mais à propos, qu’avez-vous fait du tyran farouche ?

Je racontai à Maléchard la scène du glacier ; elle lui parut assez divertissante, et, en le voyant rire, je finis par partager son hilarité.

— Nous allons le voir arriver demain matin, reprit mon compagnon de voyage, dont la gaieté parut diminuer à cette idée.

— Vous lui direz de ma part mille choses aimables, et vous lui donnerez mon adresse, dans le cas où il l’aurait oubliée ; au bois de Vincennes ou au bois de Boulogne, je serai son homme quand il lui plaira.

— Vous partez donc décidément ?

— Que voulez-vous que je fasse ici ?

— Mais… ce que vous y avez fait jusqu’à ce jour.

— Mauvais plaisant ! Ne dites pas que je suis revenu ; je vais me glisser dans ma chambre et me coucher, car je tombe de fatigue.

— Sans rancune ? dit Maléchard en me tendant la main.

— Sans rancune, répondis-je, quoique au fond j’eusse quelque peine à lui pardonner.

Le lendemain, ainsi que je l’avais résolu, je partis dès le point du jour, sans prendre congé de personne. J’emportais du canton de Berne une leçon qui m’a profité. Je me défie maintenant des regards des femmes : en revanche, je crois toujours à leurs paroles. Des sceptiques trouveront peut-être qu’il manque encore quelque chose à mon instruction.


Charles de Bernard.