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DES PARTIS EN FRANCE.

d’abord parce qu’aucune fraction n’est assez nombreuse pour la fournir, ensuite parce qu’aucune fraction, dans son sein même, n’en possède les élémens. C’est, quant à présent, une pure chimère, une chimère qu’il serait insensé de poursuivre.

Mais je veux bien qu’à un signal donné les dissensions intérieures s’arrêtent comme par miracle, et que les partis recouvrent subitement leur accord et leur unité ; je veux même, pour simplifier la question, que les fractions intermédiaires disparaissent entièrement, et que, des quatre partis constitutionnels qui se partagent la chambre, il en reste deux seulement, la droite telle que le 15 avril l’a laissée, la gauche telle que dix années d’opposition l’ont produite. Dans ce cas, il y aurait à droite ou à gauche une majorité, et par conséquent un ministère homogène. Il reste à savoir si cette majorité ou ce ministère serait en mesure de donner satisfaction à tous les besoins légitimes du pays, et de gouverner utilement.

Il est juste de le reconnaître, la droite a, comme parti de gouvernement, de grandes et précieuses qualités. L’amour de l’ordre, de la discipline, de la hiérarchie, est chez elle vif et puissant, et les dangers que des doctrines perverses et des tentatives coupables font courir à la société, ne la trouvent jamais insensible. Elle sait d’ailleurs que le pouvoir ne s’exerce qu’à de pénibles conditions, et qu’on doit lui prêter un appui énergique, si l’on veut qu’il accomplisse sa difficile mission. Elle soutient donc énergiquement le pouvoir de son choix, malgré les fautes qu’il peut commettre, et se résigne, quand il le faut, à partager son impopularité. Enfin, elle est animée d’un sentiment conservateur qui donne au gouvernement le lest dont il a toujours besoin, et qui l’empêche d’être à la merci de tous les vents et de tous les courans. Ce sont là de rares avantages, des avantages qu’on aurait tort de ne pas apprécier.

Malheureusement, à côté de ces mérites, une portion notable de la droite a un grand défaut, celui de ne pas croire assez à la vertu de nos institutions. Elle en a un autre plus grand encore, celui de chercher ailleurs qu’en elle-même sa force et son point d’appui. Je m’explique clairement. La vie politique a nécessairement ses agitations et ses désordres ; la liberté, sa licence et ses dangers. Dans ce monde, ce sont là malheureusement des abus inséparables de l’usage. Faut-il pourtant, de peur des abus, supprimer l’usage, ou du moins l’énerver et le corrompre ? Une portion notable de la droite penche vers cet avis. Ce n’est pas tout. La droite pense avec beaucoup de raison que la royauté a dans notre ordre constitutionnel un rôle important à jouer,