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guerre contre la royauté. Si le parti républicain refuse d’aller jusque-là, il faut donc qu’il se replie sur les opinions constitutionnelles, précisément comme il le fit sous la restauration, dans une situation semblable, après la défaite de la charbonnerie. À cette époque, le parti républicain ne conspirait plus ; il discutait et attendait. Ce sera, s’il suit encore cette marche, au gouvernement de 1830 de rompre l’analogie et de tromper son attente.

Avant-gardes naturelles, l’un du parti conservateur, l’autre du parti libéral, les deux partis extra-constitutionnels ne pouvaient pas être passés sous silence. Placés en dehors de toutes les combinaisons parlementaires, et très peu nombreux dans la chambre, il importe pourtant assez peu, en définitive, qu’ils soient unis ou divisés. Il en est tout autrement des partis constitutionnels, de ceux au sein desquels la majorité peut se fixer et le pouvoir se constituer sans dommage pour nos institutions et sans danger pour l’état. Or, de ces partis, le plus considérable, sans contredit, est celui qui, avec une persistance honorable, appuya énergiquement, en 1838 et 1839, le ministère de M. le comte Molé. Bien que vaincu dans les élections, ce parti forme encore plus du tiers de la chambre, et peut, en passant tout entier dans l’opposition, rendre le gouvernement à peu près impossible. Mais est-il vrai qu’il se soit préservé de la maladie commune et maintenu parfaitement uni et compact ? Est-il vrai que par lui-même il puisse suffire au gouvernement, et que, pour constituer une majorité réelle et durable, il n’ait besoin que d’un appoint de quelques voix. Il le dit beaucoup, et peut-être il le croit. Voyons jusqu’à quel point les faits justifient sa prétention.

Trois choses constituent l’homogénéité d’un parti, ses antécédens, ses opinions, les chefs qu’il reconnaît et qu’il suit. Pour savoir si le parti dont il s’agit est homogène, il faut donc l’examiner sous ces trois rapports. Je commence par ses antécédens.

On comprend facilement qu’en parlant des antécédens du parti conservateur actuel, il n’entre pas dans ma pensée de remonter au-delà de 1830. Je ne sache en politique rien de plus puéril et de plus fâcheux que d’imaginer ainsi des incompatibilités artificielles et rétrospectives. Je n’ai rien non plus à dire des légères divergences que crée toujours, que crée inévitablement la diversité des esprits et des caractères. Mais quand le parti conservateur actuel se donne pour la continuation pure et simple de la majorité du 13 mars et du 11 octobre, je lui refuse cet honneur. Parmi les membres qui composent ce parti, à côté d’hommes qui ont soutenu alors nos grandes luttes,