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posée de cette portion considérable de la chambre et du pays qui a soutenu le ministère du 15 avril contre la coalition ; le centre droit, dont les doctrinaires sont le noyau principal ; le centre gauche ; enfin la gauche constitutionnelle. Passons-les successivement en revue, et voyons quel est leur état réel.

Parmi les amis fidèles de la dynastie déchue, il en est, tout le monde le sait, qui l’eussent sauvée si elle eût pu l’être. Il en est d’autres qui l’ont aidée à se perdre. Bien que fort différens par leurs antécédens comme par leurs opinions, les uns et les autres se confondent aujourd’hui sous un même nom et semblent appartenir au même parti ; mais les seconds sont incontestablement les plus nombreux et les plus actifs. Or, quel était leur langage, quelle était leur opinion sous la restauration ? À les entendre, avec des chambres maîtresses de briser le ministère choisi par la royauté et d’exercer ainsi dans le gouvernement l’influence prépondérante ; avec la liberté de la presse, même contenue par des lois sévères et par une magistrature permanente et déléguée ; avec des administrations municipales élues, quelque restreint que fût le nombre des électeurs ; enfin avec une garde nationale choisissant elle-même ses officiers, il était impossible, absolument impossible, de sauver l’ordre et de donner au pays le repos et la sécurité. C’étaient là des idées et des institutions révolutionnaires, des idées et des institutions qui devaient périr, si l’on voulait que la société subsistât.

Quand la révolution de 1830 eut donné à la France tout ce que le parti légitimiste avait repoussé comme mauvais et funeste, le rôle de ce parti semblait donc tout tracé. Il fallait qu’il persistât dans ses opinions, et qu’il puisât dans nos discordes, dans nos agitations, de nouveaux argumens pour les défendre. « Vous avez voulu, devait-il dire, le gouvernement parlementaire, la liberté de la presse, des municipalités électives, une garde nationale souveraine ; vous les possédez maintenant, et vous pouvez en apprécier les désastreux effets. Les tiraillemens parlementaires dont vous vous plaignez, les doctrines pernicieuses que vous cherchez vainement à atteindre, les conflits entre le pouvoir central et les pouvoirs locaux qui vous embarrassent et vous troublent, les désordres enfin que vous réprimez à coups de fusil, tout cela est la conséquence nécessaire, logique, inévitable, des institutions libérales que vous vous êtes données. Reconnaissez donc que nous avions raison ; avouez votre erreur, et revenez aux idées et aux principes pour lesquels nous